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Communiqué final de la 42ème Assemblée Plénière Annuelle de la Conférence Episcopale du Congo (CEC)

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans Nouvelles Diocésaine

-v-ques-RDC.jpg Commencée le lundi 05 mai 2014, au Centre Interdiocésain des Œuvres (CIO), par la prière présidée par son Excellence Monseigneur Louis PORTELLA MBUYU, Evêque de Kinkala, Président de la Conférence Episcopale du Congo, en présence de Monseigneur Jan Romeo PAWLOWSKI, Nonce Apostolique au Congo et au Gabon, la 42ème Assemblée de la Conférence Episcopale du Congo s’achève ce dimanche 11 mai 2014, par la messe d’action de grâce, célébrée en l’Eglise Jésus Ressuscité et de la Divine Miséricorde du Plateau des 15 ans.

 

Le thème choisi cette année, porte sur:« La Famille congolaise et le dessein de Dieu : Défis, enjeux et perspectives pastorales».

 

Y ont pris part :

-      Les Vicaires Généraux,

-      Les membres du Secrétariat Général de la CEC,

-      Les Recteurs des deux Grands Séminaires,

-      Les Experts de la Commission Episcopale pour la Famille,

-      Les délégués du bureau exécutif national du CNALC et d’autres invités de marque, à côté des Evêques membres de la Conférence Episcopale du Congo :

 

1.     Monseigneur Louis PORTELLA MBUYU, Evêque de Kinkala, Président de la Conférence Episcopale du Congo,

2.     Monseigneur Anatole MILANDOU, Archevêque de Brazzaville,

3.     Monseigneur Daniel MIZONZO, Evêque de Nkayi, Vice-Président de la CEC,

4.     Monseigneur Yves Marie MONOT, Evêque de Ouesso,

5.     Monseigneur, Jean GARDIN, Evêque d‘Impfondo,

6.     Monseigneur Victor ABAGNA MOSSA, Evêque d’Owando,

7.     Monseigneur Miguel Angel OLAVERRI, Evêque de Pointe-Noire,

8.     Monseigneur Urbain NGASSONGO, Evêque de Gamboma,

9.     Monseigneur Bienvenu MANAMIKA BAFOUAKOUAHOU, Evêque de Dolisie.

 

La conférence inaugurale sur « la présentation du thème, les enjeux et les attentes du peuple » donnée par Mr l’Abbé Vincent de Paul MALONGA, Recteur de la Basilique Sainte-Anne du Congo, a été suivie de celle de l’Abbé Antonio MABIALA, Recteur du Grand Séminaire de Philosophie, sur: «  La famille noyau social dans la Bible».

 

Il y a eu ensuite une série  de conférences portant sur les réalités de la famille au Congo, dont celle de : Madame ADOU née Cornelie NGAPI, Mr Dominique NGOIE NGALLA, Mr l’Abbé MINKALA, Madame Emilienne RAOUL, le Père Roch EKOUERAMBAY et la Sœur Rolande MILANDOU. Tous ces exposés et les témoignages des couples (NKOUNKOU et NIOLI), ponctués par des échanges, partages et débats, ont permis aux participants, d’approfondir le thème de la famille, à la lumière de la parole de Dieu, de la doctrine de l’Eglise et des réalités sociales, pour adopter quelques pistes en vue d’une bonne pastorale familiale plus engagée.

 

  Au début de l’Assemblée Plénière, les Evêques ont adressé un Message au Saint Père, le Pape François, pour implorer sa bénédiction apostolique. Le mardi 6 mai, pendant la Messe, ils ont prié pour l’Archevêque de Luanda, Mgr Franklin DAMIAO, le jour de son inhumation. Dans l’après- midi, ils ont reçu la douloureuse nouvelle de la mort de 10 Prêtres centrafricains du diocèse de Berberati, tués depuis le début des événements sanglants et prié pour eux en manifestant leur communion avec l’Eglise sœur de la RCA.

 

Le jeudi en fin de matinée, les Evêques se sont rendus à la Nonciature Apostolique pour une séance de travail avec Mgr le Nonce Apostolique. Dans l’après-midi,  ils ont effectué une visite au Beach de Brazzaville, pour manifester leur sollicitude à l’endroit des ressortissants de la République Démocratique du Congo (RDC) en attente de rapatriement.

 

Le vendredi matin, les Evêques ont rendu visite au Ministre de l’Intérieur et de la décentralisation pour s’informer sur la situation de nos frères et sœurs ressortissant de la RDC. Dans l’après-midi, ils ont reçu la nouvelle du décès, en France, de Mme Geneviève GARDIN à l’âge de 99 ans, mère de Mgr Jean GARDIN, Evêque d’Impfondo.

 

Le samedi matin, au cours de l’Eucharistie, les Evêques ont prié pour l’âme de maman Geneviève et Mgr PORTELLA, au nom de toute la Conférence Episcopale, a présenté à Mgr Jean GARDIN, les sincères condoléances. Ils ont visité le nouveau siège de l’ACERAC en construction. En fin d’après midi les Evêques ont assisté au concert religieux organisé par la Paroisse Jésus Ressuscité à l’esplanade  de la Préfecture de Brazzaville, à l’occasion de la Canonisation des Saints Jean XXIII et Jean-Paul II.

                 

A l’issue de cette Assemblée, un Message a été adressé au Peuple de Dieu et aux hommes de bonne volonté, en vue de promouvoir et protéger la Famille, car « le bien de la société et de l’Eglise est profondément lié au bien de la famille» (Jean-Paul II, Familiaris consortio, n. 3).

 

Fait à Brazzaville le 10 mai 2014

 

 

 

Pour les Actes de la Conférence Episcopale du Congo,

 

Abbé Brice Armand IBOMBO

Secrétaire Général

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Ordinations Presbytérales à Kinkala ce 29 Juin 2014: Publication de Bans.

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans Nouvelles Diocésaine

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N/Réf : Lc/EV/LP/56

                                               Aux Ouvriers Apostoliques

                                             Et

                                              Aux Communautés Chrétiennes

                                                         du Diocèse de Kinkala

 

 

Chers frères dans le sacerdoce,

Chers frères et sœurs dans le Christ,

 

J’ai la joie de vous annoncer que, s’il plaît à Dieu,  le 29 Juin 2014, à la place Mariale de la Cathédrale Sainte Monique de Kinkala, j’ordonnerai prêtres les Abbés :

 

MAKOUNDOU Vivien  

MALAMOU Hervé

NKODIA Fabrice

 

A cet effet je vous exhorte à soutenir les Ordinands par vos prières.

Cette circulaire tient lieu de Publication de bans.

 

P.S : Pour toute question importante concernant les Ordinands, veuillez vous adresser au secrétaire-Chancelier. Contact : 05 322-43-79/ 06 670-34-61.

 

 

Fait à Kinkala, le 22 Mai 2014

 

 

 

 

 

 

 

Mgr Louis PORTELLA MBUYU

Evêque de Kinkala

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Mot d’ouverture des journées portes ouvertes sur les deux nouveaux Saints (Jean XXIII et Jean Paul II)

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans Nouvelles Diocésaine

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1 / Deux nouveaux Saints ! Et non les moindres !

 

Deux Papes saints qui, à la suite du Christ et dans sa lumière, vont illuminer la fin d’un siècle et le début d’un nouveau, la fin d’un millénaire et le début d’un nouveau !

Quelle grâce pour notre Eglise, Quelle grâce, pour notre monde !

 

Et il est important de remarquer que le lien entre les deux n’est pas fortuit. On pourrait même parler d’une certaine complicité, malgré la distance de temps qui les sépare.

 

En effet Angelo RONCALLI est élu Pape le 28 Octobre 1958, et Karol WOJTILA, le 16 Octobre 1978 : 20 ans de distance.

 

Cependant nous savons que Jean XXIII, à peine élu (même pas deux mois après), à la surprise générale, a annoncé la convocation d’un Concile œcuménique. « Le Concile, déclare-t-il alors, devra adapter : le magistère de l’Eglise aux besoins actuels en apportant à chaque problème, à chaque situation nouvelle, à chaque souffle de l’Esprit, la lumière fulgurante du Christ, Roi immortel et triomphant des siècles ».

 

Malgré les pressions subies de la part de certaines tendances conservatrices, grâce à une volonté irréductible et une foi inébranlable, la première session a pu se dérouler du 11 Octobre au 7 Décembre 1962. C’est la seule qu’il a pu présider, puisque, le 3 Juin 1963, il fut rappelé à Dieu. Et cette première session, qui avait rassemblé 2540 évêques venus du monde entier, donna le ton et le style, aux 3 autres sessions qui allaient suivre.

 

2/ Or il s’est trouvé que Mgr Karol WOJTILA a été ordonné évêque auxiliaire de Cracovie le 28 Septembre 1958, un mois avant l’élection du Pape Jean XXIII. Et à ce titre il a participé à la 1ère session du Concile, comme aux trois suivantes. C’est donc un évènement qui l’a profondément marqué et il s’y est engagé à fond, au point de publier, en 1972, un livre sur la mise en œuvre du Concile Vatican II intitulé « Aux sources du Renouveau ».

 

Et c’est dans cet élan qu’il convoquera encore une Assemblée générale extraordinaire du Synode des Evêques en 1985, après la clôture, sur la même question de la mise en œuvre du Concile.

 

Ainsi l’un a lancé le Concile ! L’autre s’est attelé à la suite du Pape Paul VI, à lui faire produire de nombreux fruits.

 

Ainsi nous pouvons affirmer ce lien très fort entre ces deux Saints Pape.

 

3/ Mais parlons un peu de la sainteté qu’on leur reconnait. Nous savons que la constitution dogmatique sur l’Eglise « Lumen gentium » a consacré tout un chapitre, le 5ème, sur l’appel du tout le peuple de Dieu à la sainteté :

 

N° 40 : « L’appel à la plénitude de la vie Chrétienne et à la perfeption de la charité s’adresse à tous ceux qui croient au Christ, quel que soit leur état ou leur forme de vie ».

 

Cet appel à la sainteté retentissait déjà dans le cœur d’Angelo RONCALLI, dès sa jeunesse. Il écrivait juste avant son ordination presbytérale, en 1903: « La pensée que je suis obligé et que j’ai pour devoir principal et unique de devenir saint à tout prix, doit être ma préoccupation continuelle.

 

Plus tard, déjà évêque, et visiteur apostolique en Bulgarie, en 1928, pendant une retraite, il écrit:

 

« Pendant cette retraite, j’ai senti une fois de plus, avec vivacité, le devoir que j’ai d’être saint pour de bon ».

 

Eh oui ! « Saint pour de bon », il l’a été. Aussi, après sa mort, les évêques, réunis pour la deuxième session du Concile, avaient proposé au nouveau Pape Paul VI la proclamation  immédiate de sa sainteté. Ils avaient souhaité que soit célébrée, au sein même du Concile, la béatification de leur ami et modèle Jean XXIII.

 

Le Pape Paul VI n’agréât pas cette procédure par acclamation. Il considérait que Jean XXIII méritait le procès de béatification en bonne et due forme. Ce qui se fit 35 ans après, en 1998.

 

4/ On pouvait dire autant mais autrement de Jean Paul II. Nous nous rappelons les pancartes et les banderoles, lors de ses funérailles, où il était écrit : « Santo subito » « Saint tout de suite » !

 

Le P. SLAWOMIR Oder, postulateur de la cause de canonisation de Jean Paul II a écrit: « L’existence de Karol WOJTILA puise sa lumière et son fondement premier dans son entière adhésion au Christ, dans la certitude d’être entre ses mains et de ne pas pouvoir être privé de son amour » (Le vrai Jean Paul II, p. 141).

 

Cette proximité avec ce regard vers le Christ nourrissait son sacerdoce.

 

Et le Pape Benoit XVI, dans un de ses premiers Angélus n’a pas hésité de dire que :

 

« La vie de Jean Paul II peut être illustrée idéalement comme une parabole eucharistique où le sacrifice de soi, pour l’Eglise, pour ses frères, pour la gloire de Dieu fut total ».  

 

Une vie aussi dévouée, aussi lumineuse, ne pouvait que s’enraciner dans une prière profonde et intense.

 

« La fécondité de son action, dit le postulateur, vient de ses prières,il priait beaucoup. Dans toutes les situations difficiles de son ministère, où dans des moments particulièrement critiques, Jean Paul II se confie à la prière pour trouver la lumière sur la voie à suivre » (id. p.157).

 

Quant à nous qui venons écouter les beaux témoignages qui vont être présentés sur ces deux grands Saints, nous sommes invités à nous mettre nous aussi en branle sur le même chemin de la sainteté.

 

Comme le dit l’auteur de l’épitre aux Hébreux, « enveloppé d’une si grande nuée de témoins, nous devons rejeter tout fardeau et le péché qui nous assiège et courir avec constance vers l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, le chef de notre foi, et qui la mène à la perfection » (He 12, 1-2).

 

C’est ce que Jean Paul II nous a rappelé dans sa lettre :

 

 N.M.I, 30 : « Je n’hésite pas à dire que la perspective dans laquelle doit se placer tout le cheminement pastoral est celle de la sainteté …»

 

N.M.I, 31 : « Cela signifie, exprimer la conviction que, si le Baptême fait vraiment entrer dans la sainteté de Dieu, au moyen de l’insertion dans le Christ et de l’inhabitation de son Esprit, ce serait un contresens que de se contenter d’une vie médiocre, vécue sous le signe d’une éthique minimaliste, et d’une religiosité superficielle ».    

 

Oui, il est temps de proposer de nouveau à tous, avec conviction, ce « haut degré » de la vie chrétienne ordinaire ; toute la vie de la communauté ecclésiale et des familles chrétiennes doit mener dans cette direction.

 

Que ces 2 Journées soient pour nous un moment de grâce pour nous remettre debout et en marche sur le chemin de la sainteté, à l’exemple de nos deux chers Papes.

 

 

Je vous remercie !

 

 

 

Mgr Louis PORTELLA MBUYU

Evêque de Kinkala

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A LA SUITE DE SIMON PIERRE, SOYONS, NOUS AUSSI TEMOIN DE LA FOI

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans Homélies et méditations

 

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Introduction :


1- Jésus rejoint Pierre dans sa vie quotidienne.


La rencontre entre Jésus et Pierre est située par Mathieu et Marc au bord du lac de Galilée, alors que Pierre est entrain de jeter les filets. (Commentaire: Dieu rejoint souvent les hommes dans leurs activités profanes les plus ordinaires…pas besoin d’être nécessairement en pleine méditation ou prière pour entendre sa voix ou le rencontrer). La rencontre avec Jésus puis son appel à le suivre suscitent en Pierre un élan spirituel à tout quitter pour suivre Jésus sans assurance-vie ! D’ailleurs plus tard, Pierre posera à Jésus la question suivante : « Et nous qui avons tout quitté pour te suivre qu’allons-nous avoir en héritage ? ».  La foi de Pierre commence par ce geste fou qui consiste à quitter une sécurité pour partir vers l’inconnu, à la suite d’un Inconnu. La foi est toujours une prise de risque, un saut, pas dans le vide, mais en misant sur une personne : Jésus, l’image du Dieu invisible. C’est acte de confiance absolue. Cette confiance, Pierre va encore la manifester dans l’épisode de la pêche miraculeuse ; lui, le pêcheur chevronné, va écouter la parole de Jésus le charpentier : « Sur ta parole, Seigneur, je vais jeter les filets. » (Cela ne nous fait-il pas penser à ces mots de la mère de Jésus aux noces de Cana : « Faites tout ce qu’il vous dira » ?).


2- La profession de foi de Pierre : une parole inspirée


Jésus pose à ses disciples la question de savoir qui est-il. Plusieurs réponses sont données, inspirées de ce disent les gens ; réponses trop anonymes pour Jésus qui attend de chacun de ses disciples une réponse personnelle qui a mûri tout au long de leur compagnonnage avec lui. C’est Pierre qui donne la réponse en lieu et place de tous les disciples : « Tu es le Christ, le Fils de Dieu ». Dans  cette reconnaissance formulée de son identité, Jésus  reconnaît le travail du Saint-Esprit grâce à qui les hommes peuvent appeler Dieu « Père » et Jésus « Seigneur » : « Heureux es-tu Simon, fils de Yonas, car ce n’est pas la chair ni le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est au ciel ; aussi, je te le déclare : tu es Pierre et sur cette Pierre je bâtirai mon Eglise… »

Pour vous, aujourd’hui, qui est Jésus ? Comment pouvez-vous le présenter aux autres avec vos propres mots du moment que la foi n’est pas une simple récitation de formules ?

C’est sur la foi de Pierre que Jésus a bâti l’Eglise. Cette foi, les apôtres qui ont connu Jésus, qui ont mangé et bu avec lui, ont voulu nous la faire connaître afin que nous soyons en communion avec eux, que nous soyons dans la joie et que notre joie soit parfaite.


3- La profession de foi de Pierre : une déclaration d’amour


C’est l’histoire d’une autre rencontre entre Jésus et Pierre ; cette fois-ci, c’est après la mort de Jésus. Pierre a entraîné ses amis à une partie de pêche ; et Jésus est là, sur le rivage… Jésus s’adresse à Pierre en lui posant par trois fois la question du cœur : « Simon, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? » De la réponse de Pierre va dépendre le fait que Jésus lui confie la mission  d’être le pasteur de ses brebis, de fortifier ses frères dans la foi. La réponse de Pierre est sans hésitation : « Oui, Seigneur, tu sais que je t’aime ». La foi ne va pas sans l’amour ; cette déclaration d’amour de Pierre est aussi une déclaration de foi : c’est encore Dieu qui met dans le cœur de Simon l’amour dont il aime Jésus ; non pas un amour sentimental mais une décision de suivre Jésus jusqu’au bout. Etre croyant, ce n’est pas avant tout proclamer publiquement que Jésus est le Fils de Dieu, mais c’est d’abord et essentiellement accepter l’amitié que Jésus nous offre et y répondre en l’aimant à notre tour : « Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. » « Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres. »

Pierre affirme sans hésitation aimer Jésus. Et pourtant, il le sait, la nuit où Jésus a été arrêté et conduit à la cour du grand-prêtre, Pierre a déclaré par trois fois ne pas connaître cet homme. La foi, comme l’amour, peut avoir des ratés, des pannes, elle peut être ravivée par la contemplation de l’amour fidèle de Dieu envers les pécheurs que nous sommes. Se détourner de Dieu sous prétexte que nous sommes pécheurs et indignes de lui est la manifestation d’un manque de foi. L’essentiel de la foi n’est-il pas d’adhérer à ceci  que «  Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne périsse pas mais obtienne la vie éternelle » ? Malgré son reniement, Simon-Pierre continue à avoir confiance en l’amour indéfectible de Jésus et cet amour suscite dans le cœur de Simon la réponse qui convient : aimer de tout son cœur celui qui a donné sa vie pour lui.

Entends le Christ te parler : « Je frappe et j’attends ; hâte-toi de m’ouvrir. N’allègue pas ta misère, ton indigence, car si tu les connaissais pleinement, tu mourrais de douleur. Cela seul qui pourrait me blesser le cœur, ce serait de te voir douter et manquer de confiance. Je veux que tu penses à moi chaque heure du jour et de la nuit. Je ne veux pas que tu fasses l’action la plus insignifiante pour un autre motif que l’amour. Quand il te faudra souffrir, je te donnerai la force ; tu m’as donné l’amour, je te donnerai d’aimer au-delà de ce que tu as pu souhaiter. Mais souviens-toi : aime-moi tel que tu es ; n’attends pas d’être un saint pour te livrer à l’amour,

sinon tu n’aimeras jamais. »


4- La foi, une démarche communautaire qui a un impact sur la société


La foi au Christ ne se réduit pas à un « contrat privé » entre lui et moi. Elle est une affaire communautaire puisqu’elle est l’héritage de toute l’Eglise ; je n’invente pas ce que je crois, je le reçois de la communauté des chrétiens d’hier et d’aujourd’hui. Comme les apôtres réunis autour de Pierre, le jour de la Pentecôte, c’est dans la communion avec les autres chrétiens que je dois témoigner du Christ. Un chrétien isolé aura du mal à tenir devant l’adversité ; la foi des autres est un soutien et une lumière dans les épreuves.

Notre foi commune ne nous renferme pas sur la communauté, sur l’Eglise. Elle nous envoie vers les réalités et les situations de ce monde pour y apporter le sel et la lumière de l’Evangile. Une Eglise qui ne s’occuperait que d’elle-même, de sa survie, n’est pas à l’écoute du Christ qui l’envoie vers le monde. La messe dominicale qui rassemble la communauté ecclésiale n’est pas une fin en soi ; elle est un envoi dans nos familles, nos quartiers, nos lieux de travail, pour y semer l’amour et le pardon fraternel.


Pour votre communauté chrétienne, aujourd’hui, quels peuvent être les chantiers sur lesquels le Christ pour appelle à travailler pour que la vie chrétienne ne se réduise pas seulement aux rassemblements cultuels ?

 

 

 

Abbé Olivier MASSAMBA LOUBELO

 

 

 

 

 

 

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HOMELIE DE LA MESSE DE CLOTURE DE LA SESSION PLENIERE DE LA C.E.C

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans Voix d'évêques

le-congo---Rome.jpg(DIMANCHE 11 MAI 2014)

 

 

« Que tout le peuple d’Israël en ait la certitude : ce même Jésus que vous avez crucifié, Dieu a fait de lui le Seigneur et le Christ » (Ac 2, 36).

 

Cette déclaration de l’Apôtre Pierre fait partie de son discours de la Pentecôte où il annonce et proclame la résurrection de Jésus, sa victoire sur la Mort.

 

En effet, la mort, pour Jésus, a été le lieu et le moment par excellence où s’est déployée, où s’est manifestée de manière décisive et éclatante sa puissance de vie, qui n’est autre que la puissance de son amour, car, comme il l’avait dit « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 15, 13).

 

Ainsi, comme l’a affirmé Pierre, « il n’était pas possible qu’il fut retenu dans le pouvoir de la mort » (cf. Ac 2, 24). 

 

Jésus, engagé dans la logique de l’amour vécu jusqu’à l’extrême, ne pouvait que vaincre le pouvoir de la Mort. C’est donc là, que se manifestent sa divinité et sa messianité (son caractère de Messie) :

 

« Dieu l’a fait Seigneur et Christ » (Ac 2, 36). Et lui-même l’avait déjà annoncé en ces termes : « Quand vous aurez élevé le Fils de l’Homme, alors vous saurez que Moi, je suis et que je ne fais rien de moi-même, mais je dis ce que le père m’a enseigné » (Jn 8, 28).

 

C’est donc avec cette autorité divine et messianique qu’il va envoyer ses disciples, témoins de sa résurrection, pour annoncer la Bonne Nouvelle de la victoire de vie sur la mort, de la victoire de l’amour sur la puissance du mal sous toutes ses formes. « Allez dans le monde entier, proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création ! » (Mc 16, 15).

 

Et les disciples, revêtus désormais de la même force, celle de l’Esprit-Saint, qui est, comme le dit l’Apôtre Paul dans sa lettre aux Romains, « l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts » (Rm 8, 11), vont se mettre à annoncer cette Bonne Nouvelle avec assurance, dans le même élan d’amour que leur maître, en aimant jusqu’à l’extrême, c’est-à-dire, jusqu’au don total d’eux-mêmes, jusqu’à l’effusion de leur sang.

 

En ce 4ème dimanche de Pâques, dit Dimanche du Bon Pasteur, et qui est aussi la journée mondiale de prière pour les vocations, nous sommes tous invités à laisser retentir en nous cet appel et cet envoie que Jésus Ressuscité nous adresse, dans les mêmes termes : « Allez dans le monde entier, proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création » (Mc 16, 15).

 

Et surtout à prendre conscience que nous sommes revêtus de la même force, celle de l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts (Rm 8, 11).

 

La scène évoquée par l’évangéliste Matthieu reste toujours d’actualité :

 

« A la vue des foules, il en eut pitié, car ces gens étaient las et prostrés comme des brebis qui n’ont pas de berger. Alors il dit à ses disciples : la Moisson est abondante, mais les  ouvriers peu nombreux, priez donc le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson » (Mt 9, 36-38).

 

Il est vrai que, spontanément, lorsqu’on évoque le problème des vocations, on pense plutôt aux vocations sacerdotales et religieuses. Une telle conception de la vocation dans l’Eglise est bel et bien incomplète. Car, comme le déclare le Saint Pape Jean-Paul II, dans l’exhortation « Christi fideles laïci » (n°2) :

 

« L’appel ne s’adresse pas seulement aux Pasteurs, aux prêtres, aux religieux et aux religieuses ; il s’étend à tous les fidèles laïcs ; eux aussi sont appelés personnellement par le Seigneur, de qui ils reçoivent  une mission pour l’Eglise et pour le monde ».

 

Et le Pape François de renchérir en déclarant dans son exhortation Apostolique « Evangelii gaudium  » (la joie de l’Evangile) n° 120 :

 

« En vertu du Baptême reçu, chaque membre du Peuple de Dieu est devenu disciple missionnaire (Mt 28, 19). Chaque baptisé, quelle que soit sa fonction dans l’Eglise et le niveau d’instruction, est un sujet actif de l’évangélisation, et, ajoute-t-il, il serait inadéquat de penser à un schéma d’évangélisation utilisé pour des acteurs qualifiés, où le reste du peuple fidèle serait seulement destiné à bénéficier de leurs actions ».

 

Le Saint Concile Vatican II l’avait rappelé en ces termes (LG 33, 4) :

 

« A tous les Laïcs, par conséquent, incombe la noble charge de travailler à ce que le dessein divin de salut parvienne de plus en plus à tous les hommes de tous les temps et de toute la terre ».

 

Oui, chers frères et sœurs laïcs, fidèles du Christ, il est urgent d’avoir une haute idée de votre vocation et de votre mission dans l’Eglise et dans le monde.

 

« C’est à vous qu’il revient d’une manière particulière, d’éclairer et d’orienter toutes les réalités temporelles aux quelles vous êtes étroitement unis, de telle sorte qu’elles se fassent et prospèrent constamment selon le Christ … » (cf. LG 27).

 

Cela exigera de votre part, une vie de prière toujours plus intense, une formation toujours plus profonde, une audace et une assurance toujours plus grande, si vous voulez être à la hauteur de votre vocation et de votre mission.

 

Dans tous les domaines où vous vivez, où vous travaillez, où vous évoluez, développer une conscience toujours plus vive de votre haute responsabilité.

 

Déjà le Pape Pie XII, en 1946, déclarait :

 

« Les fidèles laïcs se trouvent sur la ligne la plus avancée de la vie de l’Eglise ; par eux l’Eglise est le principe vital de la société » (cf. CL 9).

 

C’est par vous que la vie politique peut être évangélisée. C’est par vous que la vie économique peut être évangélisée. C’est par vous que la vie familiale peut être évangélisée, et ce, dans la mesure où « évangéliser, c’est porter la Bonne Nouvelle dans tous les milieux de l’Humanité », et par son impact, transformer du dedans, rendre neuve l’humanité elle-même » (EN 18).

 

Mais s’il ya un domaine de la vie qui appelle aujourd’hui une grande attention, une grande conversion, un grand engagement, c’est bien celui de la Famille.

 

En effet, comme l’a dit ce Concile, dans (GS 47), « La santé de la personne et de la société tant humaine chrétienne est étroitement liée à la prospérité de la communauté conjugale, et familiale ».

 

Et comme le dit le Saint Pape Jean Paul II, « Dans le dessein du Dieu Créateur et rédempteur, la famille découvre non seulement son identité, ce qu’elle est, mais aussi sa mission, ce qu’elle peut et doit faire ».

 

Oui, nous en appelons à un sursaut, à une conversion profonde de la part des familles. En effet les antivaleurs qui minent la famille aujourd’hui menacent fortement son équilibre. Beaucoup de maux vont être signalés dans le message. Mais je voulais attirer votre attention sur la dégradation morale qui est en cours dans notre société, et particulièrement les phénomènes du libertinage sexuel, de l’inceste, de l’homosexualité et d’autres encore. L’homosexualité qui ose s’afficher de plus en plus comme une norme sociale, tout cela appuyé par des idéologies douteuses et dangereuses.

 

C’est face à ces pratiques que les familles chrétiennes ont à porter un témoignage de grande valeur, par la fidélité conjugale, par une cohésion familiale plus forte et plus visible : il est rare, par exemple de voir les membres d’une famille aller ensemble à la célébration eucharistique (Messe) ; on accorde tellement d’importance au mouvement dont on fait partie.

 

… Témoignage de grande valeur par des temps de prière en famille, par les repas en famille, surtout le soir, par des moments de convivialité, de dialogue en famille (Père, mère et enfants).

 

… Témoignage de grande valeur par une attention soutenue à l’éducation des enfants, au fur et, à mesure de leur croissance physique, affective, intellectuelle, morale et spirituelle.

 

Tout cela exige une grande mobilisation pour la formation. Le rôle primordial des parents dans l’éducation de leurs enfants exige de leur part un effort pour s’informer et se former pour pouvoir guider l’enfant de manière appropriée dans son cheminement. Nous sommes désormais dans un monde qui connait tant de bouleversements culturels et moraux qui appellent un discernement lucide et perspicace.

 

Quant à nous pasteurs, ministres ordonnés, consacrés, il nous revient, et c’est une grave responsabilité, de soutenir ce sursaut spirituel et moral des familles chrétiennes, par le témoignage de notre fidélité à nos propres engagements, par leur accompagnement pastoral et spirituel éclairé, et, bien sûr, par la prière.

 

Tous, nous resterons attentifs et disponibles aux consignes pastorales qui seront données au sein de notre Eglise-Famille de Dieu qui est au Congo. C’est son avenir et l’avenir de la société qui est en jeu.

 

Il est sûr qu’un tel sursaut moral et spirituel, s’il est pleinement vécu, ne peut pas ne pas entrainer incompréhensions, critiques, pressions et même menaces souterraines.

 

Mais n’est-ce pas notre sort, à la suite de Jésus ?

 

L’essentiel pour nous est que l’Evangile soit annoncé et transforme du dedans notre vie sociale, et souvenons-nous de cette parole de l’Apôtre Pierre que nous venons d’entendre :

 

« Si on supporte la souffrance en ayant fait le bien, c’est une grâce aux yeux de Dieu. C’est bien à cela que vous avez été appelés, puisque le Christ lui-même a souffert pour vous et vous a laissé son exemple afin que vous suiviez ses traces, lui qui n’a jamais commis de péché, ni proféré de mensonge » (1P 2, 20-22).  

 


 

Mgr Louis PORTELLA MBUYU

Evêque de kinkala

Président de la Conférence des Evêques du Congo

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Emile BIAYENDA, un saint homme: le prêtre et le pasteur

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans Théologie

 

Cardinal-biayenda.jpgDix-neuf de vie au service de l’Eglise comme prêtre, dont neuf comme évêque, ce n’est pas beaucoup apparemment ; mais celui dont je vais présenter ici les traits forts de la vie sacerdotale est un homme exceptionnel qui n’a pas eu besoin de nombreuses années pour donner à l’Eglise qui est au Congo et à  toute la nation congolaise,  la pleine mesure des dons que Dieu lui avait faits. De 1958, année de son ordination presbytérale à 1977, année de sa mort, Emile BIAYENDA se révèle  comme un ami du Christ et un ami des hommes qui sait

compter sur la force de Dieu.

 

1-Le prêtre, l’ami de Jésus-Christ

 

 « Demeurez dans mon amour » (Jn 15, 9).Cette parole de Jésus dans l’évangile de Jean que l’abbé Emile BIAYENDA avait choisie pour son ordination presbytérale est le condensé de sa conception du sacerdoce ordonné ; et comme chez lui, le penser et le vivre doivent aller de pair, il s’est efforcé de faire cette parole un guide pour sa  vie, à la manière du psalmiste : « ta parole est une lampe sur mes pas ».  Le prêtre n’est pas d’abord un homme chargé de poser des actes cultuels ou religieux, ni de donner les sacrements, ni même d’enseigner l’évangile pour faire des adeptes. Etre prêtre c’est, avant toutes choses, s’attacher à la personne de Jésus Christ comme les sarments sont reliés au tronc de vigne qui leur donne la sève vivifiante. Connaître Jésus, c’est tout pour lui ; et le connaître c’est vivre dans son intimité grâce à la prière, à lecture des Saintes Ecritures, à la célébration de l’Eucharistie et au sacrement du pardon. C’est à ces sources que celui qui est appelé à être serviteur de ses frères dans l’Eglise doit puiser et boire s’il veut être au milieu d’eux l’image du Christ, car le prêtre est «  alter Christus ». Voici ce qu’en dit Emile BIAYENDA : « Le prêtre, lui, que fait-il ? Pour moi, je ne sais pas exactement ce que dit la théologie soi- disant d’après concile… Je m’en tiens à ce que disait la théologie d’hier, dite dépassée. Elle disait en effet : “ Sacerdos alter Christus” (le prêtre est un autre Christ). C’est une expression très dense de sens et de signification ».

 

En effet, il apparaît clairement dans les écrits et la vie de l’abbé BIAYENDA que l’identité du prêtre est conférée par Jésus lui-même qui l’appelle à être son ami pour qu’il puisse agir en lieu et place de celui qui est venu donner la vie en abondance : « Je ne vous appelle plus serviteurs, je vous appelle mes amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j’ai appris de mon Père ». Cette théologie de l’identification au Christ ne saurait être dépassée ; Emile BIAYENDA, avec fermeté, appelle à ne pas la rejeter comme un modèle d’avant le concile Vatican II : l’attachement à Jésus et la fidélité à ses commandements sont le socle de la vie presbytérale. Il y a là non seulement une théologie du sacerdoce mais aussi et surtout une spiritualité du prêtre qu’il soit religieux ou diocésain. De ce point de vue, le prêtre diocésain n’a pas à être complexé devant le prêtre religieux sous le faux prétexte que ce dernier a une spiritualité qu’il tient de son ordre ou congrégation, tandis que lui en serait dépourvu.

 

La préparation au sacerdoce, durant les années de séminaire est vécue par Emile BIAYENDA comme une avancée et un approfondissement dans cette connaissance de Jésus qui est union au Sauveur. Ses formateurs et condisciples depuis le petit jusqu’au grand séminaire ont toujours été frappés par l’attrait à la prière d’Emile ; c’est un garçon qui a une piété profonde et sans ostentation. Il a une dévotion mariale très forte ; devenu prêtre, il sera aumônier national de la Légion de Marie. Relevons quelques réflexions de l’abbé BIAYENDA lors de sa retraite d’ordination diaconale, du 19 au 23mars 1958 : « Notre ministère n’est pas fondé sur nos propres capacités, mais sur le Christ. C’est son programme à lui que nous devons suivre. Etude, vie intérieure, vie d’évangile sont les moyens que Dieu attend de nous pour continuer sa mission ». Au cours de cette même retraite, il écrit ceci qui illustre bien la place essentielle de son attachement à Jésus par la prière : « Seigneur Jésus, donnez-moi de vous chercher toujours toute ma vie. Pour que nous soyons forts et gardions en nos âmes la vraie joie, donnez à tous les hommes le goût de prier » (A.T. p.64). Voici encore d’autres réflexions d’Emile qui vont dans le même sens : « Seigneur Jésus, Vous qui m’avez guidé à Vous, Vous qui avez guidé mes pas pendant cette longue et grande montée, ce soir, plus que jamais, je viens implorer votre sainte assistance pour que fidèle à Vous, je le reste à jamais dans ces saints engagements et solennelles prestations d’amour que je vais faire à la fin de cette retraite. 

                                                                                                                                                            « Que je Vous cherche, que je Vous connaisse, vous aime et m’attache à Vous indéfectiblement jusqu’à ma mort. Mes misères, mes incapacités pourront servir, Seigneur, si je sais tout attendre de Vous…

 

« Le prêtre doit être un adorateur. Il doit savoir cesser ses activités pour aller dans le désert causer avec le bon Dieu. Adorer le Christ dans le silence. Lui demander le sens de longs moments vécus à ses pieds. Prier pour les âmes, prier à leur place…

 

« Jésus, vous êtes mon ami. Je vous appartiens avec tout ce que je suis et possède. Jésus, je voudrais être avec vous la main dans la main, comme deux amis » (Retraite de préparation à l’ordination sacerdotale, du 19 au 25 octobre 1958, in A.T. pp.65-66).

 

L’abbé BIAYENDA est de la race des mystiques : il cherche sans cesse le Seigneur, il se prépare intérieurement sans désemparer  à la rencontre de l’Ami. Il est alors disposé à répondre à l’appel du Christ qui a l’initiative d’envoyer en mission : « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi ; c’est moi qui vous ai choisis afin que vous partiez, que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure ». Le même Christ qui appelle veut que les disciples qu’il envoie l’aiment à fond, comme il veut s’en assurer pour Simon-Pierre  à qui, par trois fois, il demande : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu » ? Pour se voir confier la charge du troupeau, il faut que Pierre affirme son attachement à Jésus, attachement que celui-ci ne va pas contester malgré le triple reniement de Pierre.   

                                                      

Il n’ y a pas de doute, Emile a compris que le prêtre n’est pas un fonctionnaire du culte qui remplirait bien ses tâches pastorales ; s’il se comporte ainsi, il court le risque de s’épuiser dans un activisme incapable de révéler aux fidèles la personne même du Christ qui est le Sauveur des hommes. La fécondité du ministère pastoral ne découle pas d’abord des aptitudes humaines du prêtre, mais de sa disponibilité à se laisser habiter par le Christ, à être avec Lui « main dans la main, comme deux amis ». C’est la vie intérieure qui donne sens et richesse aux activités pastorales puisque dans la prière et la lecture des saintes écritures, le prêtre entend la voix du Seigneur qui lui commande ce qu’il doit faire et enseigner aux hommes dont il lui a confié la charge. Imiter Jésus lui-même qui est venu non pas pour faire sa volonté mais celle de son Père, telle doit être la disposition intérieure de celui qui est appelé au sacerdoce pour qu’il ne soit pas un mercenaire qui abandonnerait le troupeau en cas de danger.                                                          A la veille de son ordination sacerdotale le samedi 25 octobre 1958, Emile se confie à Jésus dans la prière en ces termes : « Ȏ Jésus, me voici à la veille de ce grand jour où du pauvre de moi, vous aller faire votre prêtre, votre instrument d’intercession entre vous-même et les hommes. Jésus, vos desseins ne sont pas ceux des humains. Vous écrivez seul droit sur des lignes brisées. Moi le néant, moi le pauvre, vous m’avez gardé sur ce chemin et demain me permettrez de franchir le seuil ! …

Le sacerdoce, ce n’est pas pour rire. Vous me confiez une mission, une mission d’amour auprès de mes frères. Vous savez, vous, Seigneur, comme cela est dur en nos jours présents, mais ce que je vous demande, c’est cette grâce de me sentir toujours pauvre et néant pour m’appuyer sur vous et ne jamais rien risquer sans vous.

 

A vous mon sacerdoce pour que vous en soyez glorifié et pour que des âmes nombreuses par lui soient sauvées. Tout ce qui m’attend, vous le savez et comme un mendiant, que j’aie toujours mes regards sur vous. Tout à vous, tout aux âmes pour vous aimer et aller vous  chanter un jour au ciel. Jésus, aidez-moi. Jésus, soutenez-moi et plutôt mourir Seigneur que devenir un infidèle et un indigne prêtre. Je me donne à vous, je me consacre à vous pour toujours jusqu’à ma mort. »                    

                                                                                                              

2- Fort avec Dieu

 

La prière de l’abbé BIAYENDA à la veille de son ordination est sans conteste le serment de fidélité, de confiance et d’amitié que le tout futur prêtre fait à Jésus qu’il reconnaît comme son ami et son maître. Il n’est pas encore prêtre, il le sera le lendemain par l’imposition des mains de son évêque, Mgr Michel BERNARD ; mais dans le cœur d’Emile, ce jour du dimanche 26 octobre 1958, fête du Christ-Roi, va être la consécration de cette amitié tissée avec Jésus depuis son baptême. Je me risque à dire qu’Emile, sans pour autant mépriser l’autorité de l’Eglise à qui le Christ a donné le pouvoir d’appeler au sacerdoce et de le conférer (qui l’a connu savait son immense respect pour l’autorité de l’Eglise), pense que l’ordination sacerdotale ne transforme pas fondamentalement un homme qui ne s’est pas préparé dans la fréquentation de Jésus à consacrer sa vie au service de ses frères. Emile mesure le poids et la difficulté de la charge, car pour lui, être prêtre est plus une charge, une responsabilité qu’une promotion, un honneur ; cette conviction n’aura pas pris chez lui une ride quinze ans plus tard, lorsqu’il est nommé cardinal par le pape Paul VI. Le sacerdoce ce n’est pas pour rire ni pour se gonfler d’orgueil car il est une mission de service et d’amour auprès des hommes et des femmes de ce temps, de tout temps, de ce pays, de tout pays. Une mission de service et d’amour ! Qu’il est difficile d’aimer. Il est déjà difficile d’aimer ceux qui sont du même sang que moi, ceux qui ont la même culture que moi… Comment aimer ceux qui me sont étrangers par le sang, les coutumes, la religion… ?

 

Le prêtre peut se sentir démuni devant cette mission à cause de ses préjugés, de son histoire personnelle, de ses limites humaines et se refuser d’aller au-delà de lui-même. Dans son ministère sacerdotal, Emile n’a pas été à l’abri de ces situations en face desquelles nos capacités humaines défaillent,  notre volonté et notre liberté sont bloquées ; sa lucidité spirituelle lui faisait comprendre qu’il était pauvre et néant ; c’est alors qu’il savait s’appuyer sur la force de Dieu, à l’image de l’apôtre Paul qui écrit : « C’est lorsque je me sens faible que je suis fort » (2Cor12, 10). Pauvre et néant, voilà comment se décrit lui-même Emile, cet ami du Christ aux vertus humaines et chrétiennes reconnues, au zèle apostolique  avéré. Voilà comment doit se décrire tout prêtre de Jésus-Christ dans la sainte Eglise catholique. Il sera encore plus près de Jésus dans la prière afin que sa grâce ne lui fasse jamais défaut ; il découvrira qu’il ne peut pas s’attribuer ce qu’il appelle ses réussites pastorales, mais qu’il les doit à l’Esprit de Jésus qui guide l’Eglise depuis le commencement.

 

Le sacerdoce est une responsabilité pour l’Eglise et l’humanité tellement vitale que celui à qui elle est confiée doit chaque jour être vigilant à entretenir et à faire fructifier le dépôt qu’il a reçu du Seigneur ; pour cela, il doit s’imposer une discipline personnelle basée sur l’intimité avec le Christ d’une part, et sur le zèle apostolique et le respect des fidèles d’autre part. Voici, à ce sujet, quelques points de la règle que se donne le tout jeune prêtre Emile BIAYENDA, elles sont empruntes de sagesse évangélique et humaine :

 

1. Dans l’administration : ce sera au nom du Christ et comme le veut et le demande son Eglise notre mère.

2. Horreur de tout ce qui sent la simonie.

3. Etre infatigable à prodiguer aux âmes les trésors de la grâce du Seigneur par les sacrements et sacramentaux dignement administrés.

4. Beaucoup estimer le ministère auprès des malheureux et des malades. Leur offrir mon amitié, mais au nom du Christ.

5. Estimer les visites des gens à domicile, mais avec toute la prudence voulue                                                     6-Ma sanctification et la conversion des pécheurs tiendront de mon Oraison et de ma Sainte Messe, de mon chapelet, de mes lectures spirituelles ; assiéger le Christ au Tabernacle et lui dire tout.

7. Combattre la médiocrité : étudier sans cesse, ne passer plus tard aucune sans avoir rien fait en ce domaine, avoir toujours un ouvrage en chantier.

8. Préparer mes sermons dans l’amour et l’inspiration par Marie. Eviter les improvisations.                               9. Me savoir partout, en tout et pour tout, prêtre du Seigneur qui a mission de le faire connaître et aimer des autres par son message appuyé  du témoignage de ma vie.                                                         10. Lutter contre tout complexe dans n’importe quel milieu. Croire à l’amour du Seigneur et rayonner sa joie.

11. Aimer les âmes, chercher leur bien réel, communier sincèrement à leurs souffrances.                                          12. Etre excessivement prudent avec elles, particulièrement avec les enfants et les filles.                                    13. Avoir en honneur mon célibat généreusement embrassé par amour pour Jésus, y voir une source d’immenses grâces que le Christ m’accordera pour la conversion des pécheurs.                                      14. Parler et prier pour les vocations.

15. Savoir obéir : me convaincre sans cesse que mes actions ne seront d’Eglise, utiles aux âmes et bénies de Dieu que dans la mesure où je serai uni à l’Eglise par mon évêque et mes supérieurs.                                                                                                                                                                 16. Dans l’apostolat, ne pas bouder les trouvailles des autres. Les adopter, les faire miennes » ( in A.T. pp 68-69).    

                           

Je ne voudrais pas ici examiner in extenso chacun de ces points de la règle que l’abbé BIAYENDA s’est donnée comme ligne de conduite. Tout prêtre peut les examiner et se rendre compte qu’ils sont des balises et des garde-fous précieux. Le plus important ici est de découvrir qu’Emile BIAYENDA prend au sérieux son sacerdoce et qu’il se donne les moyens d’être fidèle au don que Jésus lui a fait pour ses frères. Saint Paul  se stimule en écrivant ces mots plein  de zèle apostolique : « Malheur à moi si je n’annonce pas l’évangile » (1Cor 9,16) ; c’est dans le même esprit que l’abbé  BIAYENDA écrit, à la veille de son ordination sacerdotale ces mots qui sont en conclusion de la règle: « …plutôt mourir, Seigneur, que devenir un jour un infidèle et un indigne prêtre ». Prendre soin de sa propre âme c’est à coup sûr pour le prêtre l’un des meilleurs moyens de prendre soin du troupeau que le Seigneur lui  confie, car on n’est pas prêtre pour soi-même mais pour le peuple de Dieu. Ce n’est pas à un exercice volontariste qu’il se soumet ; c’est le regard tourné vers le Christ, le prêtre par excellence, qu’il avance et espère remporter la victoire.

 

Devenu évêque, il redira pour les prêtres l’exigence incontournable d’une vie évangélique authentiquement centrée sur le Christ comme voie d’une vie sacerdotale fructueuse et épanouissante : « exigence de fidélité à la parole donnée et à l’engagement contracté, exigence de générosité capable d’aller, à l’exemple du Christ, jusqu’au sacrifice , non seulement des biens matériels, mais aussi de sa propre vie, exigence de chasteté et de pauvreté pour une charité qui urge, exigence de discipline et de hiérarchie selon la volonté du Père et de l’Esprit Saint qui assigne à chacun et selon l’ordre, une fonction pour le bien de tous, comme il est dit dans l’épitre aux Corinthiens.

 

Quoi qu’on dise, la vraie liberté chrétienne ne peut s’obtenir que dans l’obéissance : comme il est écrit dans le livre des Prophètes : “ Je t’écarterai de mon sacerdoce, toi qui méprises la discipline”. Et toutes les exigences du sacerdoce que semblent rejeter les théories actuelles ne peuvent être abolies au profit de certaines théories ambiguës et mal à propos.

 

Pour empêcher que beaucoup de vocations n’aillent à la dérive, il faut sans crainte présenter une vie évangélique authentiquement centrée sur le Christ et témoigner du sérieux de la Parole de Dieu ». (in A.T. p.113).

 

Sachant qu’un engagement sans tergiversations est impossible à tout être humain même engagé sur le chemin de la sainteté, Emile, lorsqu’il est nommé évêque, choisit comme parole de vie : « Sur ta parole, Seigneur, je vais jeter les filets » (Lc 5,5). Il a longuement médité sur l’attitude de Simon-Pierre au bout d’une nuit de pêche infructueuse ; lassés, ses compagnons et lui rangent le matériel pour aller se reposer avec l’inquiétude que la nuit suivante ressemble à celle qui vient de s’achever. Mais voilà que Jésus de Nazareth, charpentier de métier, lui dit d’avancer au large et de jeter les filets…

 

C’est le matin ; Pierre sait d’expérience que sur le lac, ce n’est pas le moment propice pour prendre du poisson en quantité ; mais il donne du crédit à la parole de Jésus, il obéit, et le résultat ne se fait pas attendre. Mais pourquoi donc Pierre ne demande-t-il pas à Jésus de s’associer à eux pour créer une entreprise de pêche prospère ? Au lieu de cela, il abandonne son métier pour se mettre à l’école d’un Maître auprès duquel il n’aura jamais fini d’apprendre que l’amour et la confiance en Dieu sont le secret de la réussite du pêcheur d’hommes.

 

Ce ne sont pas sur ses qualités personnelles qu’Emile BIAYENDA compte ; il sait qu’il doit tout au Christ qui a le pouvoir de faire en sorte que même les misères et les incapacités du prêtre servent à manifester la grandeur de Dieu. Il faut que le prêtre soit saint, c’est-à-dire qu’il s’engage résolument à mettre en pratique les conseils évangéliques qui ne sont pas l’apanage des religieux ; il faut qu’il se dépouille de ce qui l’empêche d’être libre pour accueillir l’appel toujours renouvelé à avancer au large ; il doit commencer à se dépouiller de ses certitude et de sa propre volonté. Ce qui affleure ici encore c’est cette conception d’identification au Christ de l’être et de l’agir du prêtre : Jésus, en entrant dans le moment suprême du don de sa vie, prie Dieu : «  Père, non pas ma volonté, mais la tienne ». Commentant cette disposition de notre Seigneur, Emile BIAYENDA écrit : « Le Christ, c’est celui qui fait la volonté du Père. Et que veut le Père ? Le Père veut que ce monde soit dans l’ordre. Le Christ, c’est celui qui annonce la loi de l’ordre : “ Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Ne fais pas à l’autre ce que tu ne veux pas que lui te fasse ”… Alors le prêtre, comme le Christ, sera celui qui fait et annonce la volonté du Père ; celui qui proclame par sa parole et par sa vie : “ aimons-nous comme des frères”. Le prêtre, c’est celui qui unit, qui rassemble les hommes divisés par la haine. Le prêtre, c’est celui qui réconcilie ceux qui se sont brouillés. C’est en me considérant humblement, sans prétention aucune, avec toute ma faiblesse, comme “ alter Christus ” (un autre Christ), que moi, prêtre, je sais qui je suis et ce que je dois m’efforcer de vivre chaque jour.

En résumé, comme le Christ, je suis envoyé, apôtre, je dois annoncer la Parole de Dieu, je dois faire ce que Dieu veut, à savoir unir les hommes par la loi d’amour comme les enfants d’un même Père. Et cela, le monde en a besoin, en aura toujours besoin autant qu’il a besoin de nourriture et d’argent. Et cela, c’est du travail capable d’occuper pleinement une vie humaine, tout un prêtre, et c’est là toute sa vie » (in A.T.pp 114-115).

                                                                                                                                                                                          

3-Le prêtre, l’humble serviteur, l’ami des hommes

 

Emile BIAYENDA, vicaire de la paroisse Sainte-Marie de Ouenzé, puis curé de la paroisse Saint-Jean-Marie Vianney de Mouléké, à Brazzaville, ne vit pas comme un reclus ; il est chaleureux, attentif aux autres et passionné des contacts avec les personnes qu’il rencontre au cours des activités pastorales à la paroisse ou lors des visites dans les quartiers ; il se fait tout à tous, hommes et femmes, enfants et adultes, avec une attention particulière pour les démunis et les malades. Sa simplicité et la paix qui émane de sa personne sont des  armes efficaces pour gagner à Dieu le cœur de ceux qui font un bout de chemin humain et spirituel avec lui. Il puise cette simplicité et cette paix dans son amour filial à Marie, la mère de notre Seigneur. Cette piété mariale qui a germé lors de ses années de formation au sacerdoce, est un trait fort de sa vie de prêtre ; souvenons-nous qu’il aimait appeler Marie « ma bonne et tendre mère » et qu’il l’appelait pour qu’elle demeure toujours avec lui. Il priait ainsi à la veille de son ordination sacerdotale :

 

 « Marie, ma mère, je vous confie mon sacerdoce. Soyons ensemble, travaillons, prions ensemble. Que je vous aime avec votre Fils. Et que je vous fasse aimer aux âmes pour lesquelles Je consacrerai toute ma vie ». (A.T. p.71).

 

Celle qui a donné naissance à Emile, maa Biyela bia Milongo ne sera pas présente physiquement demain, à la messe d’ordination sacerdotale de son fils ; mais Emile sait qu’il n’est pas dépourvu d’amour maternel : Marie, la mère que Jésus nous a donnée lorsqu’il mourait sur la croix, est avec lui ; elle sera encore là demain et elle sera avec lui jusqu’au jour de sa mort.

                                                                                                                                                            Je me souviens clairement  que revenu de Lyon en 1969, l’abbé Emile fut invité au petit séminaire Saint-Paul, à Mbamou, pour parler aux séminaristes ; il nous invitait à réciter régulièrement notre chapelet ; il nous disait que lorsqu’il fut emprisonné en février 1965, ses geoliers l’avaient dépouillé de son chapelet, mais, ajouta-t-il, avec une sourire radieux, il avait encore ses dix doigts dont il se servait comme des grains pour réciter le chapelet.              Cette piété ne ressemble en rien à un piétisme béat. En associant Marie à sa vie sacerdotale et à toutes ses activités pastorales, l’abbé Emile se fonde sur  la conviction que la vie de l’humble jeune fille de Nazareth qui deviendra la mère du Christ est une source d’inspiration inépuisable pour tout prêtre ; en effet, Marie n’est pas seulement la mère qui prie pour les prêtres, elle est aussi la femme croyante, la femme charitable et la femme d’espérance, toute humble, qui est donnée en modèle à tout chrétien et au prêtre en particulier.                                          Suite à l’annonce de sa nomination à la charge d’évêque coadjuteur de Brazzaville, le 26 mars 1970, Monseigneur BIAYENDA prononce une allocution dans laquelle il prend Marie pour modèle :

 

« Mes biens chers frères en Jésus,

 

C’est l’occasion de le dire : vraiment, les voies de Dieu sont insondables. Il y a des surprises qui bouleversent et qui désorientent les plans des hommes. Marie, notre Mère, ne se proposait-t-elle pas dans sa loyale humilité, une vie tranquille toute effacée, au service de son Dieu ? Et brusquement Dieu en décida autrement : la voilà engagée à porter la lourde croix avec le Rédempteur : l’homme propose et Dieu dispose.

 

Point n’est besoin de rappeler que ma nomination à la charge d’évêque qui m’échoit aujourd’hui, et qui réjouit beaucoup de chrétiens, est une lourde croix. Nous le ressentons et le constatons nettement bien plus encore à cette époque de contestation. Mais quand le Seigneur parle, toute appréhension humaine doit disparaître et laisser place à l’action de grâces, au « merci » le plus sincère ; car au fond,  c’est toujours une grâce ineffable, une source de bénédiction pour tous. Aussi malgré les appréhensions, malgré les pressentiments d’un calvaire, comme Marie et avec Marie, comme Zacharie, nous ne pouvons que dire : “ Béni soit le Seigneur Dieu de l’univers, il continue de visiter son peuple…” ». 

 

Comme Marie qui accueille le plan de Dieu sur elle, Emile est rempli de foi en l’œuvre de Dieu qui donne les grâces nécessaires à l’accomplissement de la mission qu’il confie aux hommes. Il leur donne la force d’aller jusqu’au bout, d’accompagner  tout au sommet du calvaire Jésus portant sa croix, de communier à ses souffrances,  pour voir se lever le Soleil de Justice sur l’humanité encore esclave de la mort et du péché.

                                                                                                                                                        Comme Marie qui se lève et part en hâte porter à Elisabeth la bonne nouvelle de la prochaine naissance du Messie qu’elle porte en son sein, Emile est tout à son travail d’annoncer en paroles et en actes à ceux qu’il rencontre la bonne nouvelle qu’ils sont aimés de Dieu et que Dieu les veut debout et joyeux en Jésus Christ.

 

Comme Marie qui reste avec sa cousine Elisabeth, enceinte de six mois, pour lui apporter son aide, Emile est attentif aux malades et aux malheureux.

 

Il est clair que la dévotion mariale d’Emile BIAYENDA est une source d’inspiration et une force pour être un véritable disciple de Jésus, à l’exemple de Marie qui fut le premier disciple de son Fils, depuis Nazareth jusqu’à Jérusalem.

 

Chez Emile, les qualités ne sont pas en demi teinte, elles apparaissent dans toute leur maturité et ne s’éclipsent pas, car cet homme est entier et constant. Parmi ses qualités, je voudrais relever spécialement son humilité qui est à la fois déroutante et fascinante. Il a toujours été comme cela, disent ceux qui l’ont connu depuis les années de formation au séminaire jusqu’à la fin de sa vie. Mais pour le commun des fidèles, c’est la tranche de vie de l’épiscopat et du cardinalat qui marque les esprits. En Afrique (mais ce n’est pas une spécificité africaine), il n’est pas rare que les prêtres, à plus forte raison les évêques et les cardinaux sont mis sur un piédestal quand ce ne sont pas eux-mêmes qui invitent les fidèles à les hisser sur le pavois ; en effet, ces hommes de Dieu ont le privilège d’être manipulateurs du sacré et donc détenteurs de pouvoirs magico-religieux que sollicitent ceux qui sont dans les embarras de tout genre ; c’est pour cela qu’on leur doit le respect et les honneurs dus à leur rang de notables et de faiseurs de sacré. Emile BIAYENDA, évêque et cardinal, méritait ces honneurs en toute logique. Il avait conscience d’être un chef, un grand chef, il n’était pas seulement  nganga Nzambi, le féticheur de Dieu (c’est ainsi qu’on désigne le prêtre au Congo-Brazzaville), mais plus encore il était Mfumu nganga (appellation de l’évêque en pays koongo), le chef des féticheurs. Mais il n’utilisait jamais son statut de chef pour se pavaner ; c’était vraiment un prince à l’esprit noble et élevé qui savait que sa véritable grandeur ne lui venait pas de ce que les hommes l’encensaient, mais plutôt de son élection par Dieu au rang de serviteur des fidèles chrétiens.                                                          Je voudrais rapporter ici une anecdote pour illustrer mon propos : peu après sa promotion au rang de cardinal, les fidèles chrétiens de l’archidiocèse de Brazzaville, estimant que la vieille 2CV fourgonnette ne convient pas à leur pasteur, organisent une collecte aux fins de lui offrir une voiture digne de son rang ; ce sera une berline Mercedes noire ; piqué au vif par cette marque de respect  des chrétiens envers le premier cardinal du Congo-Brazzaville, le Président de la république du Congo, le commandant Marien NGOUABI, va offrir, au nom de l’Etat congolais, une Peugeot 504 noire, la voiture des officiels congolais de l’époque. Le cardinal loue la générosité des donateurs, mais très souvent, lors de ses visites pastorales ou de ses déplacements personnels, il continuera de rouler dans sa vieille 2CV.

                                                                                                                                                                                                                     Emile ne regarde jamais les gens de haut ; que ce soit au milieu des prêtres ou des fidèles, il sait exercer l’autorité en bon intendant chargé de donner à chacun sa part de nourriture et il considère les autres comme des enfants de Dieu, des frères et sœurs de Jésus revêtus d’une égale dignité ; à l’exemple du Christ qui se tient au milieu des hommes dans la posture du serviteur qui s’abaisse jusqu’à  laver les pieds de ses disciples, il vit et exerce son sacerdoce non comme une promotion sociale, mais plutôt comme un appel incessant à se mettre au service des hommes et des femmes que Dieu place sur son chemin. Le message qu’il adresse aux chrétiens et à tout le peuple congolais après la réception de la lettre officielle de son admission dans le  Collège des cardinaux en dit long sur sa lucidité et sur le sens juste et noble qu’il a de l’exercice de l’autorité dans l’Eglise :      

      

« Frères, cette nouvelle reste une grande surprise, tant pour vous que pour nous-mêmes : personne ne s’y attendait et ne pouvait s’y attendre ! Eh bien, que la volonté de Dieu soit faite et que le Seigneur et l’humanité en soient glorifiés au maximum !

 

La promotion au rang des cardinaux est un honneur, bien sûr, mais aussi et surtout une charge et un service que nous devrons assumer tous ensemble. C’est une faveur de la part du Seigneur, mais une faveur lourde de responsabilités vis-à-vis de ce monde. Aussi, nous avons tremblé profondément en apprenant cette nouvelle. Le courage nous est revenu en entendant cette parole profonde du Délégué Apostolique : “confiance en Dieu, confiance en le Pape, confiance en la chrétienté et au clergé !” Oui, nous avons alors compris que cette charge n’était pas une affaire personnelle mais l’affaire de tous : Dieu et tout son peuple. Notre force devant cette croix de salut, c’est Dieu, c’est le Saint-Père, c’est vous, chers frères chrétiens, et toutes les bonnes volontés de notre pays !

 

Et cette grande grâce, c’est à nous tous, frères, qu’elle est confiée pour le salut et le bonheur de tous : qu’elle ne soit pas vaine ! Nous devons la conserver jalousement et en tirer profit pour la plus grande gloire de Dieu et de l’humanité. Et il en sera ainsi, si nous chrétiens, nous restons dans l’Esprit de Jésus, cet Esprit de Jésus qui se manifeste dans ce monde par ce sens du respect, du service, de la charité fraternelle qui anime toute communauté joyeuse de vivre ! Cet Esprit de Jésus qui a pour signe le respect de la personne humaine quelle qu’elle soit, la conscience professionnelle dans toute charge que nous assumons en société et surtout le sens aigu de la hiérarchie… A une époque où toute autorité se trouve contestée et rendue caduque mais où par contre l’homme ressent un vif besoin de discipline pour produire efficacement, le devoir incombe aux chrétiens de se rappeler la parole irrévocable du Christ soulignant notre responsabilité : “Vous êtes le sel de la terre ! Vous êtes la lumière du monde !” (Mt 5).                                   C’est à nous donc, frères et sœurs, c’est à nous de montrer au monde la beauté et la splendeur de l’autorité, selon les vues de Dieu. Car nous savons pourquoi tel ou tel commande à d’autres hommes : nous savons que toute autorité vient de Dieu, que toute hiérarchie est œuvre de l’Esprit organisateur de Dieu…Frères, si tout homme ressent d’instinct la nécessité d’une discipline, combien plus, nous, croyants, qui savons la raison profonde de la hiérarchie, devrons-nous aimer la discipline et l’ordre. Nous portons la grande responsabilité de redonner au monde la saveur et la joie d’une vie organisée, hiérarchisée. Il nous appartient d’annoncer et de montre que “ obéir ” n’est pas se rabaisser, mais au contraire, c’est faire preuve de grandeur d’âme et d’intelligence. C’est sans aucun doute un facteur  indispensable pour toute construction. Voilà, à notre avis, chers frères, la leçon qui se dégage de cette promotion qui fait notre joie et notre fierté à tous ! » (in A.T. pp99-101).

 

Nous percevons à travers ce message que l’humilité d’Emile n’est pas la fausse modestie ; il sait l’honneur qui vient de lui être fait, mais dans le même élan, il associe à cet honneur le peuple chrétien et la nation congolaise tout entière. L’honneur qui est fait au pasteur rejaillit totalement sur ses frères ; il ne se met ni au-dessus ni en dehors de ceux à qui est destiné le message évangélique. En même temps, il ne se dérobe pas à sa mission qui consiste à parler au nom du Christ pour rappeler les exigences salutaires de la vie chrétienne, ici celle de la nécessité de la reconnaissance et du respect de la hiérarchie en vue de la construction d’une société où chacun est reconnu, et aussi celle d’une saine compréhension de l’autorité comme un don pour la promotion du bien commun. Encore une fois, sa conception et son exercice de l’autorité pastorale sont dictés par l’enseignement du Christ : « Les rois commandent en maîtres, les grands font sentir leur pouvoir ; parmi vous, il ne doit pas en être ainsi ; celui qui veut être le plus grand… ».

 

Emile n’est pas un donneur de leçons, il montre le Christ et il s’efforce à conformer sa vie personnelle à celle du divin Maître ; en cela, il indique et dénonce sans violence les tares et l’échec de tout pouvoir et de toute autorité qui se prendrait pour sa propre fin alors qu’elle est fondamentalement un moyen mis par Dieu à la disposition des communautés humaines afin qu’elles vivent et se développent harmonieusement. Il connaît bien le Congo, son pays, et il a vécu dans sa propre chair les délires cruels et néfastes d’un pouvoir politique préoccupé à terroriser par tous les moyens pour se maintenir, plutôt que de se soucier du bien-être de la population. 

 

Emile BIAYENDA est un mystique ; il trouve son accomplissement et sa joie dans la rencontre intérieure avec le Christ dans la prière, la méditation de la Parole de Dieu ; il contemple l’amour de Dieu pour les hommes manifesté en Jésus qui donne sa vie sur la croix. De cette rencontre et de cette contemplation jaillit la pressante nécessité de la mission dans les orientations pastorales et la vie quotidienne. Alors là, au mystique se joignent le sociologue et l’homme d’action pour que l’annonce du salut et de la libération de l’humanité en Jésus ne soit pas un discours éthéré sans prise réelle sur la vie des personnes et de la société. La thèse de sociologie qu’il a écrite à l’institut catholique de Lyon en 1968 est la preuve de la volonté de l’abbé BIAYENDA de ne pas dissocier la pratique  religieuse de la transformation réelle de la société , l’intelligence de la foi, le christianisme et le développement humain intégral. Emile ne se départira jamais de son regard de sociologue pour analyser l’état et les mouvements de la société congolaise qui connaît une mutation chaotique mais prometteuse entre une société traditionnelle forgée au creuset de la solidarité et du respect de la hiérarchie à une société moderne soucieuse d’un développement économique et d’une liberté à l’égard du carcan traditionnel qui soumettrait la personne à des valeurs surannées. Le sociologue sait que ce passage est inéluctable, il sait qu’il prendra le temps qu’il faudra, mais le mouvement est irréversible. En pasteur avisé, Emile ne fera pas l’éloge aveugle de la tradition ni celui de la modernité ; il voit dans l’une et l’autre des valeurs humaines à explorer et à exploiter pour le bien de chacun et de tous ; il décèle dans l’une et l’autre des ambiguïtés et des freins à la reconnaissance de la dignité et de la liberté des personnes, donc un frein au développement social et économique. Depuis 1963, le Congo les dirigeants politiques congolais ont choisi la voie du socialisme puis du marxisme-léninisme pour assurer le décollage économique et humain de la population. L’Eglise est considérée comme une force rétrograde, un frein au développement intellectuel, culturel et économique des congolais. Lorsqu’il accède à l’épiscopat, en 1970, Mgr BIAYENDA sait que sa tâche ne sera pas facile en ce qui concerne les rapports entre l’Eglise et l’Etat. Durant tout son épiscopat, il ne heurte jamais de front les autorités politiques emmurées dans l’idéologie du Parti congolais du travail, parti unique qui dirige l’Etat ; ce n’est pas dans la nature d’Emile de chercher un choc frontal ; ce n’est pas sage de vouloir le provoquer ou de céder aux provocations du camp d’en face ; en tout état de cause l’archevêque métropolitain de Brazzaville est convaincu qu’il n’ y a pas deux, mais un seul camp : celui des citoyens congolais. Il usera à la fois de sa force intérieure, de sa charité fraternelle et de son autorité pastorale pour éviter le clash qui compromettrait la sécurité des personnes et l’unité nationale. Les incidents et les moments chauds ne manquent pas, mais Emile croit que c’est dans les situations les plus tendues qu’il faut instaurer le dialogue dont les fruits sont toujours un cadeau de l’Esprit de Dieu qui fait grandir le Corps du Christ qu’est l’Eglise. Le dialogue n’est pas démission, trahison du trésor de la foi, elle est pastorale intelligente et patiente qui permet de faire découvrir que Dieu n’est pas contre le bonheur de ses créatures, mais qu’au contraire, il trouve sa gloire dans l’homme debout et heureux. Son respect et son estime pour le Président de la république, le commandant Marien NGOUABI qui le lui rendait bien ont jeté en terre congolaise la semence de la reconnaissance de l’Eglise comme un élément qui contribue au développement de la nation.

 

Au sujet du développement qui doit être le souci et le travail de toutes les composantes de la nation, le pasteur de l’archidiocèse Brazzaville adresse aux chrétiens à l’occasion de Noël (trouver l’année)  une lettre intitulée « Noël, les chrétiens accueillent le libérateur de tous les hommes » :                       

                                    

 « Accueillons surtout dans la joie tous les appels de libération qui jaillissent aujourd’hui du sol de notre pays, du cœur de notre peuple congolais. Ensemble, nous luttons pour notre indépendance réelle, pour la libération politique, économique et culturelle de notre pays qui veut grandir dans la dignité et le respect de ses valeurs propres. Notre pays s’est engagé dans la lutte pour la construction d’une société plus juste. Il nous revient à tous de tout faire pour que le socialisme soit vraiment la volonté d’arracher tous nos frères congolais à l’irresponsabilité, pour qu’il soit une invitation à tous à prendre part à la construction nationale ; et qu’ainsi se réalisent chez nous des conditions politiques et sociales permettant à tous de participer à la gestion de notre croissance.

 

Quotidiennement, chaque homme et chaque femme est appelé à prendre sa vraie place, dans une totale disponibilité, chrétiens, nous voulons assumer pleinement nos responsabilités.                                                    La lutte pour la libération est aussi quotidiennement celle contre la misère, la faim, la maladie, la malnutrition, le chômage, l’analphabétisme.

 

C’est au sein de toutes ces réalités que nous voulons fêter la naissance du Christ. Le Christ vient au milieu de nous pour nous inviter à vivre encore plus conformément la lutte de chaque jour que nous partageons avec tous nos frères. Il veut aussi nous permettre de porter nos libérations humaines à leur perfection, à leur total accomplissement.

 

Nous connaissons tous les reproches que nous adressent beaucoup de nos contemporains. La religion leur apparaîtrait encore comme un obstacle à la vraie libération de l’homme, elle encouragerait l’homme à une attente passive de l’au-delà, le dispensant ainsi de faire des efforts afin de transformer cette vallée de larmes en un monde plus humain…                                                         Pour nous chrétiens, connaître Dieu et son dessein est une invitation immédiate à participer avec tous les hommes de bonne volonté à la lutte pour la justice et pour la transformation du monde … »

                                                                                                                                                          Emile ne fait pas que parler de la justice sociale et du souci des pauvres. Il constate que beaucoup de personnes âgées à Brazzaville sont délaissées, abandonnées à elles-mêmes, soit parce que les familles sont elles-mêmes démunies pour les prendre en charge, soit parce qu’elles sont accusées de sorcellerie. Le cardinal BIAYENDA fait siennes les souffrances de ces personnes âgées et de leur entourage. Il n’existe aucune structure appropriée pour accueillir ces personnes nécessiteuses, alors Emile va s’employer de toutes ses énergies à en créer une. Le terrain est trouvé juste à côté de la cathédrale ; il prend langue avec la congrégation des petites sœurs des pauvres, il obtient de l’Etat congolais les autorisations requises, et la première maison d’accueil des personnes âgées au Congo va ouvrir ses portes en (chercher l’année).

 

L’autre chantier qui le préoccupe est celui de l’éducation de la jeunesse. Il est conscient qu’il n’y a pas d’avenir pour le Congo si les enfants et les jeunes ne reçoivent pas de formation intellectuelle et humaine solide. Depuis 1965, les écoles catholiques et protestantes qui dispensaient le savoir et le savoir-vivre ont été nationalisées par décision unilatérale des autorités politiques congolaises qui  estiment que l’Eglise, par le biais de l’enseignement, corrompt et aliène la jeunesse. Les mouvements de jeunesse chrétienne ont été dissous également. Mais la nationalisation des écoles a plongé l’enseignement au Congo dans un état de délabrement à maints niveaux : pédagogique, éducatif, éthique ; la prépondérance des mouvements de jeunesse socialiste qui favorisent plus le bourrage idéologique qu’une formation intellectuelle et professionnelle solide ajoute à la désolation. Emile sait tout cela mais au lieu de diaboliser ou de stigmatiser qui que ce soit, il invite à la prise de conscience et à la  collaboration pour assurer l’avenir de la nation.  En 1974, à l’occasion du Carême, l’archevêque de Brazzaville s’adresse, dans une lettre pastorale, à tous ceux qui ont en charge l’éducation des jeunes : « Frères et sœurs dans le Christ, l’époque que nous vivons est passionnante ! Tous, nous assistons à des transformations des conditions de vie, à des possibilités inouïes pour l’homme de maîtriser l’univers, à un progrès immense de la science et des techniques qui font notre admiration et  nous portent à l’enthousiasme.                                                                                   Avec cette évolution du monde, rapide, extraordinaire, se développent des faits nouveaux : les moyens de communication, par exemple, qui font prendre conscience à l’homme de sa dimension universelle…Toutefois, ces faits nouveaux demandent à l’homme de s’asseoir et de réfléchir, car ils comportent un danger, un risque dont nous devons mieux prendre conscience pour pouvoir le dominer.

 

Parmi tous ces faits nouveaux, il en est un qui s’impose à nous, Congolais, avec force et netteté : celui de l’éducation des enfants et des jeunes. Il n’est pas trop fort de dire que nous assistons, ici dans notre pays, comme dans beaucoup d’autres pays, à une “véritable marée des jeunes”. Je pense que c’est notre devoir à tous : évêque, prêtres, religieux et religieuses, éducateurs, enseignants, responsables des mouvements de jeunes, laïcs, de nous asseoir calmement et durant tout ce temps de Carême, temps de prière, de lumière, de conversion, de faire le point, de prendre le problème à bras le corps et d’y apporter chacun à sa place et selon sa mesure, la solution ou les solutions simples, pratiques, efficaces qui s’imposent.                                           C’est dans ce but que je m’adresse à vous tous qui avez une part importante dans l’éducation des enfants, à vous aussi jeunes des C.E.G. (Collèges d’enseignement général) et des lycées, pour que cette lettre de Carême soit lue, discutée, méditée, non pas comme une simple parole humaine, mais comme cette Parole de Dieu “ vivante, efficace et plus incisive qu’aucun glaive à deux tranchants, qui pénètre jusqu’au point de division de l’âme et de l’esprit, des articulations et des moelles et qui peut juger les sentiments et les pensées du cœur ” (He 4, 12)…

                                                                                                                                                             Tout au long de cette année, en écoutant avec bienveillance les uns et les autres, j’ai été frappé d’entendre très souvent les mêmes mots : “ Nous sommes débordés ; les enfants n’obéissent plus ; les enfants ne travaillent plus ; les enfants n’écoutent plus personne ; nous ne savons que faire…” Si c’est la voix des enseignants, c’est la même chose : “ De notre temps, les études c’était quelque chose ; maintenant les élèves ne savent plus rien, ne travaillent plus, n’obéissent plus ”. Et tous, nous rejetons la faute sur l’autre : “ C’est la faute des parents ”, disent les enseignants ; et tous, à bout d’argument : “ C’est la faute de l’Etat ”…                                                  Véritable marée des jeunes, enfants livrés à eux-mêmes sans discipline ni cadre, rejet de la responsabilité les uns sur les autres, les conséquences d’un tel état de fait sont graves…Aussi je vous invite à vous asseoir, simplement, calmement, sans esprit de parti ou de polémique, je vous invite à réfléchir et à faire la lumière.

 

Quelles sont les causes de tous ces faits ?

Que pouvons-nous faire ? Quelles consignes votre évêque peut-il vous donner ? ».                                                

 

L’évêque Emile veille avec soin sur le troupeau dont il a reçu la charge ; même dans un contexte politique difficile, il ne capitule pas ; peu importe que l’Eglise n’ait plus ses écoles collèges et lycées, la mission prophétique lui incombe toujours de faire prendre conscience des dangers et de susciter les énergies des peuples pour qu’ils avancent vers un développement intégral. L’évêque Emile est dans la droite ligne du concile Vatican II qui dit que l’Eglise ne peut pas se désintéresser de la vie des hommes de ce temps dont elle partage les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses : « Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses  des disciples du Christ, et il n’y a rien de vraiment humain qui ne trouve un écho dans leur cœur » (Constitution pastorale Gaudium et spes, préambule). 

                                                                                

Conclusion 

 

 Emile BIAYENDA, évêque et cardinal est un prêtre à la personnalité attachante. Il provoque et invite le prêtre que je suis à plus d’intériorité. En faisant défiler les quelques souvenirs qu’il me reste de lui, mais surtout en relisant ses écrits, j’ai la conviction que ce n’est pas à lui que je m’attache mais à Celui qu’il a accueilli dans son cœur et dans sa vie pour le révéler aux autres comme la source du bonheur véritable : Jésus Christ, le fils de Marie, le Fils de Dieu. Merci à toi, taata Emile, d’aider les prêtres à aimer Jésus et à le servir dans nos frères et sœurs, surtout les plus pauvres et les plus délaissés.          

 

Abbé Olivier MASSAMBA LOUBELO                                                                                                                                  

 

                                          

                                                                                                                                                                             

 

 

                                       

                                                                                    

 

 

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HOMELIE DE LA MESSE DES VŒUX TEMPORAIRES DES SŒURS DES SACRES COEURS (Lâdi)

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans Voix d'évêques

mgr-louis-portel.jpg (KINKALA, LE 05 Mai 2014)

 

 

Ba Tata na ba Mama, Ba ngwala zola,

 

Mbila ya Nzambi, kêti Vocation mu lumputu, yê kuâ mpindu ya luzolo. Nînga, gâ kati dieto, kâ gêna muntu kô, Nzambi wu ka lembo zolo. Bêto babonso dianga, tuê mu mbanzulu zâ Nzambi, bungu luzolo luandi mu bêto, tezo pêlé, lua toma sâmpa.

 

Ni dîo, Gâ ntontoansi gâ lembolo muntu, wâ butuka kua bô, yandi kâ wayilu kuê Nzambi. Bantu babonso dianga, ntété ba yilama mu vumu kia ngudiawu, Nzambi wâ kî kuêzekelé zingu kiawu. Tiangu muna muntu-muntu, zingu kiandi kiê gâ moko mâ Nzambi, yandi wâ ki kutikidi mionso mia mpindu mu bungu dia bêto babonso.

 

Kuê bêto bantu, kolo di kangamanê samu miamionso, ni dimosi kua : Ni mu bakula luzolo luakulu lua mpamba, lua tu zololo Tata. Mboko, na mu lenda mu bêla mû lukuikulu lua Nzambi na tê, gâna nsuka.

 

Nkiana bwa nsonekene wô mbikudi Isaï tî :

 

“Meno ni Mfumu, Nzâmbiâku.  Nikusîmbidi mu kôko kua ndaku,  nikutêlele mpe ti : « Kusândi bunkuta, ni nge nitâma kuizi kakula. »”(Isaï 31, 13).

 

Ni bungu diô, bayaya, beto babonso tu fueni bakula tî, Mfumu Nzambi betô ka Zololo, bêto ka kwê kêlé, bêto ka kwê wungi, bêto ka kwê kakudi.

 

Kiûvu, ki tu fueni ku ki yula, ni mu zaba kuâ, muna muntu:

 

“nga meno mbila’ani ni yê? Mfumu Nzambi gê ka zololo na bâ? bwê nfuêni ku m’sarila?

 

M’vutu mu kiûvu kia mpila yô, ka diena kô ti, gô n’katia bendo yî kuiza. Kâ, ni mu kidzunu, na mu n’dimbutulu, na mu kisambu kwa, tu lenda ya bakila, bêto ka tu sê têmbé na luzolo lua Nzambi.

 

Tiangu, mu l’Eglise, gâ kati dia kanda dia kintuandi, mwê Mbila zazingi, mwê nzanda vocation, Bu sidi:

 

-        Mbila kêti Vocation ya ba fidèle laïc, bawu ba tewôlo mbila gâ kati dia bisalu bia n’tî’eyi, ngatu ba sobêssa n’tî mu nsalulu na mu kimbangui kia zingu kiawu. (Ni ba Chrétien babonso).

 

-        Kwê mpê, Mbila kêti Vocation ya bô ba solo mu bâ gâ mbuka ya Kriste, mu tumba n’kayulu, mu tuadisa n’kungi na mu bâ, nkiana Kriste: Mûtu na kilungi kia l’Eglise, nituandi. (Ni ba Nganga-Nzambi).

 

-        Kwê mpê, Mbila kêti Vocation ya bô ba solo mu lânda na pêle-lendê zingu kia Kriste, ba ka bâ baku n’kolo, mu ki tumba na mu gâna nkayulu wâ zingu kiawu kiakionso mu bungu dia luzolo lua tu zololo Tata. (Ni ba Mère, kêti ba Frère).

 

Ngudia kiêleka tî, Kriste wâ ki bêtolé, wâ kitukidi mputu, na wâ ki yêkolé gâ môko mâ Tata. Ni dîo kâ kadidi makuêla, ngatu n’timandi wâ n’kaka wa vwê kua kwê Tata.

 

Kriste wâ tumakanê bwabwingi kwê Tata, na ngudia bulenvo, n’kiana bua nsonêkené wô santu Za:

 

“ Bidia bia meno, ni mu sadila miô mi zololo yândi wantâmbika, na mu manisa salu kia ka ngêni ” (Jn 4, 34).

 

Kiô ni zingu kia Kriste. Ndumba zi, zingu ni kiô mpê ba tambudi mu landa. Mbila ni yô bâ wîdi, na ba dimbitiri buyokêle. Bâ mbuta ni dîo beri têla tî:

 

“Bongwa ka bingila m’nwâ, gâla kâ gâla wô”.

 

Kâ, mu lenda zingu kiô, tâbi bâ tatamana, ntangu zazonso, mu sadila mpana yawuyi mu zingu kiawu kia n’kâka, bungu n’ti yî ni bô yi kêkolo. Kâ, ka ba bândi n’kiana:

 

 “Lubutuyongo, wâ kâla masangu kêti mayaka, kâ mu nsekê za nga  ni nduazi kua”.

 

Ni bungu dîo, bâ fuêni lomba ngolo za nzambi, lumbu ba sidi lumbu, ngatu bâ lenda. Bâ fuêni sungamana mpê Kriste tangu zazonso, mu n’dimbutulu ya zû dia Nzambi.

 

Mboko, kwê beto, tâbi twê ku babakisi, twê ku gâni môko, tangu zazonso, mu kisambu, mu malongi, na mu kâbu. Bungu mu kikulu tu tomono zaba ti:

 

“Biyabi bia nâki moko mpamba, ndoko ngundi za m’kama”. Kêti: “Ngolo za kinda, dzunu kia bîba”.

 

Kuê bala beto ba ta kukitumba lôlo, Kriste ka bê kôlo dia zingu kiawu, ba kitumba mankululu mu kwê mwagassê N’sangu za nvukulu, ka dienâko tî mu Zû kua, kâ, na mu kimbangi kia zingu kiawu, mu busantu bwawu. Ni dîo tu ba têla:

 

“Busantu bueno tu kêkolo”.

 

Nzambi ka ba gâna buesso bua ntâtamanu, ngatu ba bê nguria mbangi za luzolo lua Nzambi na za busantu buandi.

 

Nzambi wa bonga !

 

 

 

 

 

 Mgr Louis PORTELLA MBUYU

Evêque de Kinkala

 

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NELSON MANDELA, LEÇONS DE VIE POUR LE MONDE

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans culture

 

 

mandela.jpg A l’heure où le monde entier rend hommage à Nelson Mandela, notre émission dominicale, le Jour du Seigneur, tient elle aussi à évoquer la mémoire de celui qui n’est plus depuis longtemps un citoyen d’Afrique du Sud mais le frère universel de tous ceux qui sont épris de liberté, de paix et de justice. En effet, l’Eglise n’est pas une entité à part, elle est intimement unie, de part son être et sa vocation, aux joies, aux peines et aux espoirs de toute l’humanité. Donc, même s’il ne s’agit pas d’une personnalité religieuse comme ce fut à la mort de Jean-Paul II, les chrétiens, particulièrement en Afrique, s’inclinent devant la mémoire de ce fils de notre terre.

Pourquoi un tel hommage unanime à Nelson Mandela s’élève-t-il des quatre coins du monde ?

La vie de cet homme est fascinante en ce sens qu’il s’est forgé une personnalité exceptionnelle dans une situation sociale et politique extrêmement dramatique et compliquée, celle de l’Afrique du Sud forgée par l’Apartheid. Avec d’autres, Mandela, qui était avocat, s’est engagé à combattre ce système qui déniait aux Noirs, pourtant largement majoritaires démographiquement dans ce pays, d’avoir les mêmes droits politiques et économiques que la minorité blanche. Ce combat se révélera par la suite être un combat pour l’égale dignité de tous les êtres humains et pour la fraternité entre au-delà de l’appartenance raciale ou tribale.

Pour ce faire, Mandela a employé plusieurs moyens. Il s’est engagé dans l’African National Congress (ANC) et a épousé sa lutte armée pour déstabiliser le régime de l’apartheid. Mis en prison, il a continué avec sa force morale, à dénoncer le système et il s’est imposé rapidement et naturellement comme le leader et l’emblème de la lutte des Noirs pour leur liberté.

 

Dans cette lutte, il a fait preuve de :

Ténacité : la prison et d’autres formes de pression ne l’ont pas brisé et détourné de l’idéal auquel il avait consacré son énergie, son intelligence et sa vie.

Esprit de Réconciliation entre Blancs et Noirs, oppresseurs et opprimés, avec corolaire le Pardon (le pardon est une exigence éthique et politique sans laquelle la violence s’installe en permanence et gangrène les relations sociales). La Commission Vérité et Pardon fut pensée dans ce sens.

Lucidité morale et politique : La vengeance ne conduit qu’au chaos, on ne chasse pas la nuit avec l’obscurité, on chasse la nuit avec la lumière. Les Noirs avaient hâte de régler leur sort à ceux qui les avaient exploités, écrasés, massacrés, humiliés. Rompre le cercle infernal de la violence.

Autorité : Mandela ne fut pas seulement une autorité, en plus, il avait de l’autorité. C’est ce qui lui a permis de calmer la soif de vengeance de Noirs et qui a imposé le respect que lui vouaient ses adversaires. Il a continué a avoir cette autorité même quand il s’est retiré du pouvoir.

Liberté par rapport au pouvoir : Il aurait pu, comme d’autres (Mugabé), s’incruster au pouvoir… mais il est conscient de ses limites, c’est aussi une forme de lucidité. Ce qu’il a impulsé, d’autres peuvent le continuer.

 

Leçon aux hommes politiques :On entend dire, depuis sa mort, qu’une lumière s’est éteinte. Je pense et j’espère que non ! Le flambeau que Mandela a allumé par sa lucidité, son humanisme et son courage ne disparaitront pas après sa mort. Après Mandela, on ne peut plus penser la politique comme avant : stratégie d’acquisition du pouvoir et de sa conservation, moyen d’accéder aux richesses matérielles et au confort. L’homme politique Mandela pourfend le Prince de Machiavel et met à bas la politique du ventre. C’est ce qui fait de Mandela l’homme adulé qu’il est même de ceux qui l’ont combattu.

 

Leçon aux chrétiens :Ce ne sont pas ceux qui disent « Seigneur, Seigneur, » qui entreront dans le royaume des cieux, mais ceux qui font la volonté de mon Père.

« Celui qui veut être grand, qu’il soit le serviteur de tous »

« Aimez vos ennemis, priez pour ceux qui vous persécutent… »

« Pardonnez, et l’on vous pardonnera »

 Aujourd’hui, s’accomplit pour Mandela cette béatitude : « Heureux les artisans de paix, le royaume des Cieux est à eux ».

« Si tu dénoues les liens de servitude, si tu libères ton frère enchaîné, la nuit de ton chemin sera lumière de midi ».

 

Nelson Mandela, repose en paix, et que tes œuvres t’accompagnent devant l’Eternel.

 

Abbé Olivier MASSAMBA-LOUBELO

 

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LA DIACONIE, POUR UNE VIE CHRETIENNE AUTHENTIQUE

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans Théologie


 imposition-des-mains-daleb.jpg  Il y a près de cinquante ans, se tenait le deuxième concile du Vatican.  A l’approche de cet anniversaire, je voudrais vous introduire à repenser le lien de l’Eglise et du monde, et les liens entre les membres de l’Eglise, à la lumière de l’esprit de diaconie qui innerve l’un des documents essentiels du concile qu’est la constitution pastorale Gaudium et spes.


 L’Eglise, servante de l’humanité. 

 

Gaudium et spes appelle les chrétiens à ne pas considérer le monde dans lequel ils vivent comme une réalité dont il faut se méfier parce qu’elle est rebelle à l’évangile et  hostile à l’Eglise. Celle-ci est invitée à se décentrer d’elle-même pour accueillir le monde comme un chantier divin qui n’est pas encore achevé. Alors, au lieu que l’Eglise se mette à diaboliser ce monde, le concile l’invite à le regarder avec amour et compassion (car il est l’objet de l’amour de Dieu), afin que « les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps… » soient  «  aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ et » qu’il n’y ait « rien de vraiment humain qui ne trouve un écho dans leur cœur » (G.S. préambule).

A l’image du Christ serviteur. Si l’Eglise est définie par le concile Vatican II comme  sacrement du Christ, signe visible et efficace de sa présence et de son action au milieu des hommes, elle doit se mettre, à l’exemple de son divin Maître, au service de cette humanité à qui est destiné l’évangile. La diaconie devient, dans ce sens, l’être même de l’Eglise au cœur du monde et la manière authentique d’être des chrétiens. Toute la vie relationnelle des chrétiens est appelée à devenir diaconie, c’est-à-dire ouverture aux autres et disponibilité active, bienveillante, car l’Esprit de Dieu les fait sortir d’eux-mêmes pour être tournés vers les autres et vers les réalités humaines que Dieu a déjà fécondées de son Esprit.

 


Une exigence de notre baptême. De ce fait, la diaconie n’est pas l’apanage de quelques personnes qui auraient reçu un appel particulier (encore moins l’apanage des diacres permanents !) ; elle est l’exigence ordinaire, «  la petite voie » dans laquelle Dieu nous invite à marcher quels que soient nos engagements dans la cité et quelle que soit notre situation personnelle; elle est l’exigence inhérente à notre vie baptismale qui  fait de nous des prêtres, des prophètes et des rois en vue de prier pour le monde, en vue d’annoncer la présence et de l’action de Dieu dans la vie des hommes, en vue de servir les hommes et les femmes que Dieu met sur notre chemin, surtout les plus petits et les plus pauvres. C’est de cette façon que nos communautés chrétiennes seront pleinement missionnaires, à l’exemple d’Etienne et Philippe, préposés au service des tables par les apôtres, et qui se mettent à annoncer l’évangile.

 


Olivier MASSAMBA-LOUBELO, prêtre.

 

 

 

 

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PRESENTATION DE L'EXHORTATION APOSTOLIQUE « EVANGELII GAUDIUM » DU PAPE FRANÇOIS MGR SALVATORE FISICHELLA

par Abbé Wenceslas daleb mpassy

publié dans Théologie

 

Présentation de l'Exhortation apostolique « Evangelii gaudium » du Pape François publiée le 26 novembre 2013, par Mgr Salvatore Fisichella, président du Conseil pontifical pour la promotion de la Nouvelle évangélisation.

 

Evangeliigaudium : l'Exhortation apostolique du Pape François écrite à la lumière de la joie, pour redécouvrir la source de l'évangélisation dans le monde contemporain. C'est ainsi que l'on pourrait résumer le contenu de ce nouveau document que le Pape François donne à l'Eglise pour préciser les chemins que la pastorale doit emprunter dans un avenir immédiat. C'est une invitation à retrouver une vision prophétique et positive de la réalité, sans pour autant se cacher les difficultés. Le Pape François nous encourage et nous engage à regarder devant nous, au-delà de ce temps de crise, faisant une nouvelle fois de la croix et de la résurrection du Christ l' « étendard de la victoire » (85).

 

A plusieurs reprises, le Pape François fait référence aux Propositiones du Synode d'octobre 2012, montrant ainsi combien la contribution du Synode fut importante dans la rédaction de cette Exhortation. Le document va cependant plus loin que l'expérience synodale. Le Pape y imprime non seulement sa propre expérience pastorale, mais aussi l'invitation à accueillir le moment de grâce que vit l'Eglise, afin d'avancer avec foi, conviction et enthousiasme la nouvelle étape de l'évangélisation. Reprenant l'enseignement de Evangeliinuntiandi de Paul VI, il place de nouveau au centre la personne de Jésus Christ, premier évangélisateur qui appelle chacun de nous à prendre part avec lui à l'œuvre du salut (12). « L'action missionnaire est le paradigme de toute œuvre de l'Eglise » (15) affirme le Saint Père. C'est pourquoi il nous faut accueillir ce temps favorable pour discerner et vivre la « nouvelle étape » de l'évangélisation (17) qui s'articule autour de deux thèmes qui forment la trame de l'Exhortation. D'une part, le Pape François s'adresse aux Eglises particulières, confrontées aux défis et aux opportunités propres aux différents contextes culturels, pour qu'elles soient en mesure de spécifier le travail de nouvelle évangélisation dans leurs pays. D'autre part, le Pape indique un dénominateur commun, pour que toute l'Eglise, et chaque évangélisateur, puisse adopter une méthode commune, signe que l'évangélisation est un chemin où l'on marche à plusieurs, jamais de façon isolée. Les sept points, regroupés dans les cinq chapitres de l'Exhortation, constituent la vision du Pape à propos de la nouvelle évangélisation : la réforme de l'Eglise sur la voie de la mission, les tentations des agents pastoraux, l'Eglise comprise comme la totalité du Peuple de Dieu qui évangélise, l'homélie et sa préparation, l'intégration sociale des pauvres, la paix et le dialogue social, les motivations spirituelles de l'engagement missionnaire. Le lien entre tous ces thèmes est l'amour miséricordieux de Dieu qui va à la rencontre de chacun pour manifester le cœur de la révélation : la vie de chacun trouve son sens dans la rencontre de Jésus-Christ et dans la joie de partager cette expérience d'amour avec les autres (8).

 

Le premier chapitre développe la réforme de l'Eglise sur la voie de la mission, appelée à « sortir » d'elle-même pour aller à la rencontre des autres. Le Pape y exprime la « dynamique de l'exode et du don que représente le fait de sortir de soi, de cheminer et de semer toujours, et toujours plus loin » (21). L'Eglise doit faire sienne l' « intimité de Jésus qui est une intimité itinérante » (23). Comme nous y sommes désormais habitués, le Pape s'attarde en des expressions qui font leur effet et crée des néologismes pour faire comprendre la nature de l'évangélisation. Parmi eux, le « Primerear », c'est-à-dire Dieu qui nous précède dans l'amour, montrant à l'Eglise le chemin à parcourir. L'Eglise n'est pas dans une obscure impasse, mais avance sur les pas du Christ (Cf. 1 P 2, 21), pour cela sûre du chemin qu'elle parcourt. C'est pourquoi elle avance sans peur. Elle sait qu'elle doit « aller à la rencontre, chercher ceux qui sont loin, parvenir jusqu'aux croisements des routes pour inviter les exclus. Son désir de proposer la miséricorde est inépuisable » (24). Pour aller dans cette voie, le Pape François insiste sur la « conversion pastorale », qui veut dire passer d'une vision bureaucratique, statique et administrative de la pastorale à une perspective missionnaire, où la pastorale est en état permanent d'évangélisation (25). De même qu'il y a des structures qui facilitent et soutiennent la pastorale missionnaire, il y a malheureusement « des structures ecclésiales qui peuvent conditionner le dynamisme évangélisateur » (26). L'existence de pratiques pastorales dépassées et fanées oblige à la créativité pour repenser l'évangélisation. En ce sens, le Pape affirme : « Une détermination des objectifs sans un travail de recherche communautaire des moyens à prendre pour les atteindre est vouée à demeurer une pure fantaisie » (33).

 

Il faut donc « se concentrer sur l'essentiel » (35) et savoir que seule une dimension systématique, c'est-à-dire unifiée, progressive et proportionnée de la foi, peut nous venir en aide. L'Eglise doit pouvoir établir une « hiérarchie des vérités » et sa relation avec le cœur de l'Evangile (37-39). Il nous faudra éviter de tomber dans le piège d'une présentation de la foi seulement sous son aspect moral, en s'éloignant du caractère central de l'amour. Dans le cas contraire, l' « édifice moral de l'Eglise risque de s'effondrer comme un château de carte, et ceci est le plus grand danger » (39). Le Pape insiste fortement pour que l'on trouve l'équilibre entre le contenu de la foi et le langage pour l'exprimer. La rigidité avec laquelle on tient à la précision du langage peut parfois en ruiner le contenu en se détournant d'une authentique vision de la foi (41).

 

Le passage important de ce chapitre est le n° 32 où le Pape François montre l'urgence qu'il y a à avancer dans certaines perspectives de Vatican II. Il s'agit en particulier du primat du Successeur de Pierre et des Conférences épiscopales. Déjà, dans Ut unum sint, Jean-Paul II avait demandé qu'on l'aide à mieux comprendre les objectifs du Pape dans le dialogue œcuménique. Le Pape François va dans le même sens et se demande si une telle aide ne pourrait pas parvenir d'une évolution du statut des Conférences épiscopales. Un autre passage (n° 38-45) est particulièrement important quant aux conséquences qu'il implique dans la pastorale : le cœur de l'Évangile « s'incarne dans les limites du langage humain ». La doctrine s'insère dans la « cage du langage », pour employer une expression chère à Wittgenstein, ce qui implique un vrai discernement entre la pauvreté et les limites du langage, et la richesse - souvent encore inconnue - du contenu de la foi. Le danger est réel que l'Église ne prenne pas en compte cette dynamique. Il peut ainsi arriver que sur certaines positions, il y ait comme un enfermement et une sclérose du message évangélique, en n'en percevant plus le développement propre.

 

Le deuxième chapitre est consacré aux défis du monde contemporain et aux tentations qui amoindrissent la nouvelle évangélisation. Tout d'abord, le pape affirme qu'il est nécessaire de retrouver son identité sans complexe d'infériorité qui amènerait à « cacher son identité et ses convictions... parvenant ainsi à étouffer la joie de la mission en une sorte d'obsession d'être comme tout le monde et d'avoir ce que les autres possèdent » (79). Les chrétiens tombent alors dans un « relativisme encore plus dangereux que le relativisme doctrinal » (80), parce qu'il touche directement la façon de vivre des chrétiens. Il arrive ainsi que dans de nombreuses manifestations de la pastorale, les initiatives sont plombées par la mise en avant de l'initiative et non des personnes. Le pape affirmé que la tentation est réelle et commune d'une « dépersonnalisation de la personne ». De la même façon, le défi de l'évangélisation devrait être abordé comme une chance pour croître, plutôt que comme une raison de tomber en dépression. Mort à l' « esprit défaitiste » (88). Il nous faut retrouver le primat de la relation personnelle sur la technique de la rencontre qui déciderait comment, où et pour combien de temps il faudrait rencontrer les autres en partant de ses préférences (88). Parmi ces défis, il nous faut relever ceux qui ont un rapport direct avec la vie. La « précarité quotidienne avec ses funestes conséquences », les différentes formes de « disparité sociale », le « fétichisme de l'argent et la dictature d'une économie sans visage », l' « exaspération de la consommation » et le « consumérisme effréné »... nous place face à une « globalisation de l'indifférence » et une « dépréciation moqueuse » de la morale, qui exclut toute critique de la domination du marché, qui, à travers la théorie de la « rechute favorable » illusionne sur les réelles possibilités d'agir en faveur des pauvres (Cf. N° 52-64). Si l'Eglise demeure crédible en beaucoup de pays du monde, y compris là où elle est minoritaire, c'est en raison de ses œuvres de charité et de solidarité (65).

 

Pour l'évangélisation de notre temps, face au défi des grandes « cultures urbaines », les chrétiens sont invités à fuir deux expressions qui en détruisent la nature et que le Pape François appelle « mondanité » (93). Il s'agit en premier lieu de la « fascination du gnosticisme » : une foi repliée sur elle-même, sur ses certitudes doctrinales, et qui transforme l'expérience qu'on en fait en critères de vérité pour juger les autres. Le « néo pélagianisme autoréférentiel et prométhéen » de ceux pour qui la grâce n'est qu'un accessoire tandis que leur engagement et leurs forces sont seuls responsables du progrès. Tout ceci contredit l'évangélisation et crée une sorte d' « élitisme narcissique » qui doit être repoussé (94). Qui voulons-nous être, se demande le Pape ? « Généraux d'armées défaites » ou bien « simples soldats d'un bataillon qui continue à combattre » ? Le risque d'une « Eglise mondaine drapée dans le spirituel et le pastoral » (96) est bien réel. Il nous faut donc résister à ces tentations et offrir le témoignage de la communion (99) qui s'appuie sur la complémentarité. A partir de là, le Pape François milite pour la promotion des laïcs et des femmes, de l'engagement pour les vocations et les prêtres. Regarder ce que l'Eglise a accompli comme progrès ces dernières années nous éloigne d'une mentalité de pouvoir, au profit du service pour une construction unifiée de l'Eglise (102-108).

 

L'évangélisation est la mission de tout le peuple de Dieu, sans exclusive. Elle ne peut être réservée ou déléguée à un groupe particulier. Tous les baptisés sont directement concernés. Dans le troisième chapitre de l'Exhortation, le Pape François en explique le développement et ses étapes. On met en évidence en premier lieu le « primat de la grâce » qui agit inlassablement dans la vie de tout évangélisateur (112). Puis est développé le rôle des différentes cultures dans le processus d'inculturation de l'Evangile, et le danger de tomber dans « l'orgueilleuse sacralisation de sa propre culture » (117). Enfin, on parle du rôle fondamental de la rencontre personnelle (127-129) et du témoignage de vie (121). On insiste enfin sur la valeur de la piété populaire, où s'exprime la foi authentique de tant de personnes qui donnent ainsi le témoignage de la simplicité de la rencontre de l'amour de Dieu (122-126). Pour terminer, le Pape invite les théologiens à valoriser les diverses formes d'évangélisation (133), et s'arrête assez longuement sur l'homélie comme forme privilégiée d'évangélisation, et qui demande une vraie passion et un vrai amour de la Parole de Dieu et du peuple qui nous est confié (135-158).

 

Le quatrième chapitre est consacré à la dimension sociale de l'évangélisation. C'est un thème cher au Pape François parce que « si cette dimension n'est pas clairement prise en compte, on court le risque de défigurer le sens authentique et intégral de la mission d'évangélisation » (176). C'est le thème majeur du lien entre l'annonce de l'Evangile et la promotion de la vie humaine en toutes ses expressions. La promotion intégrale de toute personne nous empêche d'enfermer la religion en un fait privé, dépourvu de conséquences sur la vie sociale et publique. Une « foi authentique implique toujours un désir profond de changer le monde (183). Deux grands thèmes font partie de ce passage de l'Exhortation. Le Pape en parle avec une grande passion évangélique, conscient que l'avenir de l'humanité est en jeu : l' « intégration sociale des pauvres » et « la paix et le dialogue social ».

 

S'agissant du premier point, l'église, à travers la nouvelle évangélisation ressent comme sienne la mission de « collaborer pour résoudre les causes instrumentales de la pauvreté et pour promouvoir le développement intégral des pauvres », comme d'accomplir « des gestes simples et quotidiens de solidarité face à la misère concrète « qui est chaque jour devant nos yeux »(188). Ce qui ressort de ces pages denses, c'est l'appel à reconnaître la « force salvifique » des pauvres, et qui doit être au centre de la vie de l'Eglise avec la nouvelle évangélisation (198). Il nous faut donc redécouvrir d'abord l'attention, l'urgence, la conscience de ce thème, avant toute expérience concrète. Pour le Pape François, non seulement l'option fondamentale pour les pauvres doit être réalisée, mais elle est d'abord une « attention spirituelle » et « religieuse » et est pour cela prioritaire (200). Sur ces thèmes, la Parole du Pape François est franche et sans détour. Un « Pasteur d'une Eglise sans frontière » 8 210), ne peut se permettre de regarder ailleurs. C'est pourquoi il demande avec force de considérer la question des migrants et énonce clairement les nouvelles formes d'esclavage. « Où est celui qui tue chaque jour dans la petite fabrique clandestine, dans le système de prostitution, les enfants utilisés pour mendier, en celui qui doit travailler caché parce qu'il n'est pas régularisé ? Ne nous leurrons pas. Il y a de nombreuses complicités » (211). De mille manières, le Pape défend la vie humaine depuis son commencement et la dignité de tout être vivant (213). Sur le second aspect, le Pape énonce quatre principes qui sont le dénominateur commun pour l'avancée de la paix et sa traduction sociale. Peut-être en mémoire de ses études sur R. Guardini, le Pape François semble créer une nouvelle opposition polaire. Il rappelle en effet que « le temps est supérieur à l'espace », « l'unité a le dessus sur le conflit », la « réalité est plus importante que les idées », et « le tout est supérieur aux parties ». Ceci nous amène au dialogue comme première contribution à la paix, et qui concerne, dans l'Exhortation, la science, l'œcuménisme et le rapport avec les religions non chrétiennes.

 

Le dernier chapitre parle de l' « esprit de la nouvelle évangélisation » (260). Elle se développe sous l'action de l'Esprit Saint qui anime de façon toujours nouvelle l'élan missionnaire à partir de la vie de prière où la contemplation tient la place centrale (264). La Vierge Marie « étoile de la nouvelle évangélisation » est présentée, en conclusion, comme l'icône de l'annonce et la transmission de l'Evangile que l'Église est appelée à vivre avec enthousiasme et dans l'amour du Seigneur Jésus.

 

« Ne nous laissons pas voler la joie de l'évangélisation ! » (83). Le langage de cette Exhortation apostolique est clair et immédiat, sans rhétorique ni sous-entendu. Le Pape François va au cœur des problèmes de l'homme d'aujourd'hui, qui demandent à l'Église plus qu'une simple présence. Il lui est demandé de renouveler ses programmes et sa pratique pastorale dans le sens de la nouvelle évangélisation. L'Evangile doit être adressé à tous, sans exclusive. Certains, cependant, sont privilégiés. Sans équivoque, le Pape François précise son orientation : « Ce ne sont pas tant les amis et les riches voisins, mais plutôt les pauvres, les infirmes, ceux qui sont souvent dévalorisés et oubliés... aucun doute ou explication ne doivent affaiblir ce message si clair » (48).

 

Comme en d'autres moments importants de son histoire, l'Eglise d'aujourd'hui ressent le besoin d'un regard attentif pour évangéliser à la lumière de l'adoration, avec ce « regard contemplatif » pour voir les signes de la présence de Dieu. Les signes des temps ne sont pas seulement encouragés, mais ils deviennent critères d'un témoignage efficace (71). Premier d'entre nous, le Pape François nous rappelle le mystère central de notre foi : « Ne nous éloignons pas de la résurrection de Jésus, ne nous donnons jamais pour vaincus, arrivera ce qui arrivera » (3). L'Eglise du Pape François se fait compagnon de route de nos contemporains en recherche de Dieu et désireux de le voir.

 

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